Barnier et Attal

Michel Barnier premier ministre : enfin un écolo de droite ?

Après plus de 2 mois d’un insoutenable suspense et des concertations à n’en plus finir, le couperet est tombé ce jeudi, Emmanuel Macron a choisi de nommer Michel Barnier, membre du parti Les Républicains, premier ministre. 

Âgé de 73 ans, il possède une expérience de près de 50 ans et un parcours politique assez impressionnant.

On trouve notamment dans son CV les fonctions de ministre de l’environnement et de l’agriculture. Ancien candidat à la primaire des Républicains en 2022, il s’était distingué par une certaine “lucidité” vis à vis de la crise climatique, chose assez rare pour un politique de droite. 

Sa nomination est-elle donc une bonne nouvelle pour l’écologie ?  A t-on réellement affaire à un écolo de droite comme le laisse entendre notre titre quelque peu accrocheur ?

Un savoyard au bilan intéressant

Commençons par la genèse de son parcours, Michel Barnier est savoyard et vient donc d’un territoire profondément rural ce qui dénote pas mal de la majorité des personnalités politiques au pouvoir ces dernières années. Il est issu d’une famille de la classe moyenne avec un père chef d’une petite entreprise et une mère revendiqué comme catholique de gauche pratiquante et assez engagé en faveur de la sécurité routière. Il lui a d’ailleurs rendu un bel hommage dans son discours de passation.

Si l’on revient sur son bilan en tant que ministre de l’environnement du gouvernement Juppé, sous la présidence de Jacques Chirac, on retrouve à son actif plusieurs initiatives intéressantes dont la loi Barnier, une des premières loi à instaurer les principes généraux du droit de l’environnement, votée en 1995 qui définit pour la première fois les principes de “précaution”, “prévention” et “pollueur-payeur”. À cela s’ajoute la création du “fond Barnier” pour la prévention des risques naturels majeurs. 

De son passage au ministère de l’agriculture pendant la présidence de Nicolas Sarkozy, on retiendra un bras de fer remporté contre la FNSEA et les lobbies de l’industrie chimique pour lancer le plan ECOPHYTO afin de réduire de 50% l’usage des pesticides. Il a également été remarqué pour avoir ouvert son ministère aux ONG environnementales, rompant alors la tradition d’un dialogue uniquement concentré entre les syndicats et le monde politique. Ce fut également un fervent défenseur de l’agriculture biologique. 

Son bilan aux 2 ministères est salué, au-delà de ses partisans, par des ONG comme Générations Futures ou Greenpeace. Celles-ci émettent toutefois de fortes réserves sur sa nomination qui “s’inscrit dans la continuité d’une politique ultra-libérale », et serait “incompatible avec les enjeux de transformation radicale de notre système économique”.

Des positions écologiques libérales

On vous a parlé ici, d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître. A l’aune des derniers rapports du GIEC et des nombreuses alertes sur les risques liés au changement climatique, quelles sont les positions de notre nouveau premier ministre ? Lors de la passation, il a promis de dire “la vérité » sur la « dette écologique qui pèse lourdement sur les épaules de nos enfants ». Mais de quelle vérité parle-t-il ?

Sur l’énergie, il est très attaché au nucléaire pour assurer notre souveraineté mais il s’est montré dans le passé, également favorable à l’investissement dans des énergies renouvelables, comme le photovoltaïque, la biomasse ou encore l’hydraulique. Il est toutefois sceptique sur l’éolien, qui d’après lui  “fait beaucoup de dégâts”.

Dans une tribune du journal Le Monde publiée en 2023, il s’insurgeait contre “l’écologie punitive” que pratiquerait l’Union Européenne. Il se dit favorable à une politique “plus équitable”, à plus de liberté pour les Etats, les entreprises ou les agriculteurs, pour faire “avec eux et pas contre eux”. On retrouve ici certains réflexes néo-libérales de confiance en le marché pour changer les choses, ce qui va à l’encontre de la logique de planification écologique recommandée par certains experts.

Sur le logement, il indiquait lors de sa campagne en 2022 vouloir un « grand plan national d’isolation des logements ».

L’écologie au 2nd plan malgré tout ?

On peut craindre que malgré l’ampleur des réformes nécessaires, l’écologie ne soit malheureusement pas le chantier prioritaire, alors qu’elle devrait infuser dans tous les domaines du gouvernement. En effet, Barnier ne doit sa nomination qu’à l’unique bonne volonté du RN de ne pas le censurer. Ces derniers n’étant pas réputé comme étant de farouches défenseurs de l’environnement, leurs thèmes de prédilection comme la sécurité ou l’immagrition risquent d’occuper davantage que l’écologie l’espace médiatique et politique

De plus, dans un contexte de déficit budgétaire important, on risque d’assister à des coupes au ministère de l’écologie et sur certains dispositifs d’accompagnement, dans la continuité des économies réalisées par le gouvernement Attal sur les injonctions de Bruno Lemaire. 

En résumé, parmi tous les noms (hors NFP) qui ont circulé ces dernières semaines, Michel Barnier apparaît comme “la moins pire des solutions” pour l’écologie. Mais l’ampleur du défi qui nous attend, serait-elle se contenter de si peu d’ambitions ?

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