La promesse des territoires

Les progrès de la science pour améliorer l’agriculture fusent. Aujourd’hui, on a plein de solutions innovantes pour rendre l’agriculture plus résiliente : diversification des cultures, méthodes de biocontrôle, revitalisation des sols…

Alors comment se fait-il que le monde agricole soit en crise ? Et que ce secteur soit à peine plus durable qu’avant ? 

L’agriculture, un secteur bloqué

En fait, ces innovations peinent à trouver leur place. De la sélection variétale jusqu’aux étagères du supermarché, il se passe beaucoup de choses et c’est loin d’être un long fleuve tranquille. Prenons pour exemple les cultures de légumineuses (lentilles, pois chiche…). Elles sont très intéressantes agronomiquement et pour la santé. On aimerait ainsi développer cette filière en France. Mais elle rencontre de nombreux obstacles ! En amont de la filière, peu de budget est alloué à la recherche et au développement. Sur la ferme, les agriculteurs ne sont pas très à l’aise techniquement avec cette nouvelle culture. Et en aval, il y a peu d’infrastructures pour stocker cette « culture mineure ». Enfin, les consommateurs trouvent les lentilles un peu trop vertes pour les retrouver trop fréquemment dans leur assiette. Bref, le marché des légumineuses appartient encore à un marché de niche.

Pour en sortir, le chercheur, l’agriculteur, la coopérative, l’industrie agroalimentaire doivent communiquer et s’organiser ensemble. Ce qui n’est pas évident compte tenu de la configuration actuelle de la France, très centralisée sur la capitale. 

La décentralisation, vers une nouvelle géographie du développement 

Une filière est efficace si elle est bien structurée au sein d’un territoire. Mais en France, la décentralisation est encore très limitée dans l’agriculture. Les espaces ruraux sont alors des réceptacles de normes décidées à l’extérieur (par l’UE, l’État…) et non coordonnées. 

En redynamisant les territoires, les pouvoirs de décision et d’action seront transférés à des échelons locaux. Alors les territoires pourront se réapproprier leurs ressources afin de s’éloigner du système dominant (qui conduit à l’agrandissement des exploitations et à la désertification). Et les acteurs des filières innovantes, comme celle des légumineuses, pourront coopérer plus facilement. 

Aux élections européennes : un territoire en mouvement 

Le parti politique territoire en mouvement prône la décentralisation. La « métropolisation rurale » est probablement un des leviers les plus intéressants pour améliorer notre agriculture, mais aussi les systèmes de santé, de cutures et d’innovations. Se formeront ainsi des réseaux d’acteurs générateurs d’innovation !

Landel, Pierre-Antoine. « Décentralisation et innovation en agriculture ». Pour 212, no 5 (2011): 115‑21. https://doi.org/10.3917/pour.212.0115.

https://www.territoiresenmouvement.com/

Meynard et al, « Socio-Technical Lock-in Hinders Crop Diversification in France ». Agronomy for Sustainable Development 38, no 5 (2 octobre 2018): 54. https://doi.org/10.1007/s13593-018-0535-1.

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Le Sahel Sous l’Étau d’une Vague de chaleur mortelle

CLIMAT

Une récente étude du réseau World Weather Attribution (WWA) a révélé que la vague de chaleur meurtrière qui a frappé le Sahel début avril est directement liée au changement climatique d’origine humaine. Du 1er au 5 avril 2024, le Mali et le Burkina Faso ont été témoins d’une vague de chaleur sans précédent, avec des températures dépassant les 45 °C, provoquant un nombre considérable de décès dans ces régions.

Les scientifiques du WWA ont déterminé que des températures aussi extrêmes auraient été impossibles sans un réchauffement global de 1,2 °C, principalement causé par l’activité humaine, notamment la combustion d’énergies fossiles. De plus, ils ont souligné que ce type d’événement ne se produit en principe qu’une fois tous les 200 ans, soulignant l’exceptionnalité de cette vague de chaleur.

Si les émissions de gaz à effet de serre continuent au rythme actuel, cette étude prédit que de telles vagues de chaleur pourraient devenir jusqu’à 10 fois plus fréquentes dans un futur où le réchauffement atteindrait 2 °C. Cette perspective inquiétante soulève des préoccupations majeures quant à l’adaptation des populations à ces conditions climatiques extrêmes.

L’impact de cette vague de chaleur a été dévastateur, avec une augmentation significative des décès et des hospitalisations enregistrés. Bien que les habitants du Mali et du Burkina Faso soient habitués à des températures élevées, la durée et l’intensité de cet événement ont dépassé les normes habituelles, mettant en lumière les vulnérabilités croissantes face aux changements climatiques.

Des facteurs tels que les coupures de courant on exacerbés les conséquences de cette chaleur, qui ont limité l’accès aux dispositifs de refroidissement et affecté les services de santé. Au Mali, où les coupures de courant sont fréquentes en raison de problèmes d’infrastructures et de gestion énergétique, la situation a été particulièrement critique.

En outre, cette vague de chaleur est survenue à un moment sensible, pendant le jeûne du Ramadan, rendant les conditions encore plus difficiles pour de nombreuses personnes. Ce phénomène a particulièrement touché les personnes âgées et les jeunes enfants. Ceci souligne encore une fois que les vagues de chaleur sont parmi les catastrophes naturelles les plus meurtrières et qu’elles exacerbent les inégalités existantes.

Il est impératif que des mesures urgentes soient prises pour atténuer ses effets et renforcer la résilience des communautés vulnérables. Cela nécessite des actions concertées à l’échelle mondiale pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et s’adapter aux réalités d’un climat en évolution rapide.

Sources:
https://www.ouest-france.fr/environnement/rechauffement-climatique/la-vague-de-chaleur-meurtriere-au-sahel-est-d-origine-humaine-selon-les-scientifiques-e72e066e-fd73-11ee-9b3d-44ca7a681769

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Réserves sauvages : les limites de la non gestion

Depuis quelques décennies, un concept prend de plus en plus d’ampleur  dans le monde environnementaliste : le réensauvagement. “Libre naturalité”,  “laisser faire” ou encore “non-gestion”, les thermes sont nombreux pour en  décrire l’idée : des espaces isolés de toute activité humaine, à l’exception  d’un peu d’écotourisme, pour en faire des havres de vie sauvage. 

Seulement,  les réserves en question commencent à se heurter aux réalités des limites de ce concept.

Exemple de fiasco de la “non-gestion” : Oostvaarderplassen

En 1968 fut fondée au Pays Bas, par l’écologiste Franz Vera, la réserve  naturelle de Oostvaarderplassen. L’idée du biologiste était de laisser la nature  “se réguler toute seule”, en clôturant 5000 hectares de zone humide. Au bout  de quelques années, le milieu a commencé à se fermer, c’est-à-dire que les  arbres se sont mis à pousser. 

Ne souhaitant pas que la diversité d’habitat soit  étouffée par la forêt, il a été décidé d’introduire 34 aurochs de Heck, 20  chevaux koniks et 44 cerfs élaphes, des grands brouteurs semblables à ceux de  la région à la fin de la dernière ère glaciaire.

30 ans plus tard, le parc était peuplé de 5000 de ces animaux. Après des  années de surpopulation, donc de surpâturage, le parc, qui avait atteint un bon niveau de biodiversité, s’est considérablement désertifié. 

Après plusieurs hivers cléments, plus de 3000  animaux sont morts de faim lorsque le froid s’est abattu de nouveau sur la  réserve. Désormais, les autorités maintiennent  le nombre de brouteurs à 1500 têtes. 

On ne peut pas dire que le laisser faire ait été une réussite. D’autres réserves n’ont cependant pas eu le même destin.

Parcs nationaux : quand le laisser faire fonctionne

En 1872, dans le Wyoming, fut fondé le premier parc national des Etats  Unis d’Amérique, le Yellowstone. Il s’agit de la première réserve de vie sauvage  de cette ampleur : de par sa taille, 8 983 km², mais aussi par ses nouvelles règles. 

Jusqu’alors, que ce soit sur le jeune ou le vieux continent, les espaces  sauvages connus et fréquentés par les Hommes étaient la plupart du temps  des territoires de chasse ou d’exploitation forestière. Au Yellowstone, le tourisme est  globalement la seule activité humaine autorisée.

Aujourd’hui, c’est un nom qui fait référence, pourtant, cette réserve  aussi a connu des jours difficiles. Plus d’un siècle après sa création, le parc était  en proie au même mal qui a rongé Oostvaarderplassen : le surpâturage. 

En  effet, faute de grands prédateurs (le loup ayant disparu de la région en 1930),  les grands ongulés, comme les wapitis, ont proliféré, brouté les jeunes pousses  d’arbres dont ils sont friands, mettant en péril la régénération des forêts.

Dans les années 90, pour résoudre ce problème, les autorités du parc ont décidé d’y réintroduire des loups, capturés au Canada. D’une soixantaine de loups réintroduits entre 1995 et 1996, la population du parc serait passée à environ 120 têtes en 2005 selon une étude. Cette  réintroduction a porté ses fruits : la population de wapitis a diminué de moitié  sur cette même période. Aujourd’hui, les populations semblent avoir  trouvé un certain équilibre.

Le problème des réensauvageurs

Le Yellowstone n’est pas le seul exemple, on pourrait citer de  nombreuses réserves du même type partout dans le monde rencontrant le  même succès. 

Mais alors, comment expliquer ces écarts de résultats entre des  réserves qui ont vraisemblablement la même doctrine ? Une réponse s’impose :  il faut se donner les moyens de ses ambitions ou accepter de revoir ses  objectifs à la baisse.

Une différence qui saute aux yeux entre les réserves fonctionnelles et celles qui échouent est la taille. Regardons les 2 exemples que nous avons utilisés : presque 90 000 hectares pour le Yellowstone contre 5000 hectares pour Oostvaarderplassen : la réserve hollandaise ne couvre qu’un dix huitième de la surface du Yellowstone. 

Une réserve en libre naturalité nécessite de très grands espaces sauvages, ce qui est difficile à trouver dans notre Europe de l’Ouest, aux campagnes morcelées et anthropisées.

Faute de pouvoir faire des réserves plus grandes, il semble raisonnable  d’abandonner le fétiche de la “nature qui se régule toute seule” et préférer à la non-gestion des modes de gestion douce, qui consistent par exemple à recourir à la force de travail d’animaux plutôt que d’engins, bruyants et brutaux (dans la mesure du possible évidemment).

La gestion d’espaces naturels nécessite du pragmatisme, pour le bien-être des animaux qui y évoluent comme pour celui des Hommes qui vivent à proximité. Les gestionnaires de Oostvaarderplassen ont su s’adapter et changer leur doctrine face aux résultats désastreux du laisser faire dans leur réserve. 

Il est dommage de voir des associations de réensauvagement s’entêter dans cette voie, malgré les dangers qui menacent leurs parcs, et contre lesquels Oostvaarderplassen met en garde.

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Mine de Lithium en France : on touche le fond ou au but ?

Mine de Lithium en France : On touche le fond ou au but ?

La mine de Lithium à Echassières : nouvel Allier de l’écologie?

À Echassières, dans l’Allier, un important gisement de lithium a été découvert il y deux ans.  En 2028, un grand projet d’exploitation minière devrait démarrer à l’initiative de la société française Imérys. Ce projet, à plus d’1 milliard d’euros d’investissements, devrait créer plus de 1600 emplois dans la région.

L’objectif de l’entreprise est clair : rendre la France souveraine et indépendante en ressources énergétiques. En effet, les 1600 emplois créés sur une trentaine d’années sont une aubaine pour ce département qui fait partie des plus pauvres de France. Selon l’insee, 15,5 % de ses habitants vivant sous le seuil de pauvreté fin 2011. L’augmentation de cette précarité touche  surtout les jeunes, qui peinent à entrer sur le marché du travail, et les familles, notamment monoparentales.

Le développement de la plus grosse mine de lithium d’Europe : objectif stratégique majeur ?

Le lithium est utilisé aujourd’hui pour construire des batteries qui font fonctionner nos téléphones et nos voitures électriques.  97% de la production de lithium est assurée par des pays hors Union Européenne. Les premiers pays exportateurs de lithium sont notamment l’Australie avec plus de 30% de la production mondiale, suivi de près par la Chine (environ 25%). Cette dépendance est accrue en raison que le seul pays exportateur de lithium en Europe, le Portugal, peine à  répondre aux commandes urgentes des pays européens comme la France ou l’Allemagne. L’interdiction de la construction de voiture à essence d’ici 2035 au sein de la zone de l’Union Européenne crée de nombreuses tensions géopolitiques et économiques.

Un projet en dents de scies

Le projet se présente comme exemplaire avec la mise en place d’une mine en souterrain pour limiter les nuisances sonores et les poussières. Il met toutefois en péril la biodiversité du département de l’Allier. En effet, le Département de l’Allier se caractérise par une diversité exceptionnelle . Il compte ainsi de nombreuses espèces d’intérêts, protégées sur le plan national et européen, avec par exemple la loutre, le castor, le saumon, Son plus grand représentant, la rosalie des Alpes, une espèce d’insecte coléoptère vivant exclusivement dans ses bois, est directement menacé par les travaux de la société française. La destruction de plusieurs centaines d’arbres met en péril l’habitat naturel de cet animal en voie de disparition.

Un désastre écologique assumé ?

Pour faire des économies d’eau, l’entreprise a déclaré se servir d’une partie des eaux usées avec l’aide de la station d’épuration de Montluçon. En effet, l’entreprise promet toutefois de limiter les quantités totales d’eau nécessaires grâce à son procédé de recyclage qui garantirait de réutiliser 90% des volumes puisés. «On ne prétend pas que la mine n’aura pas d’impact sur l’environnement, résume Alan Parte. En outre, la boite française prévoit de consommer 1,2 million de mètres cubes par an, essentiellement en s’alimentant dans la Sioule, la rivière voisine.

L’arsenic : un danger sous-estimé ?

La grande concentration de métaux lourds comme l’arsenic dans les sous sols de la région serait susceptible de présenter un «risque très significatif pour la santé humaine et l’environnement». En effet, la présence d’arsenic à proximité de la future mine de lithium pourrait modifier l’écoulement des nappes souterraines. L’eau risque d’être pollué par les résidus de métaux toxiques jusqu’ici emprisonnés dans la roche. Ainsi, l’extraction du lithium dans la mine pourrait dissiper des particules d’arsenic dans l’atmosphère, favorisant les risques de cancer de la peau.

Une autre solution est-t-elle possible ?

Le lithium n’est peut-être pas la solution ! Pour preuve, Tiamat, une start-up amiénoise issue du CNRS, développe des batteries à base de sodium, nettement plus abondant. Le sodium est en effet le sixième élément le plus abondant dans l’écorce terrestre. En outre, la facilité à trouver des matières premières dans la nature notamment par ses faibles coûts d’extraction et une utilisation limitée d’énergie, fait du sodium un élément à faible impact environnemental. Néanmoins, l’un des principaux inconvénients des batteries au sodium est leur faible densité énergétique. Les batteries au sodium ont encore une densité assez faible, entre 140 Wh/Kg et 160 Wh/kg, par rapport à 180 Wh/Kg – 250 Wh/Kg pour les batteries lithium-ion.

Finalement, un projet qui fait grise mine ?

Aujourd’hui, le sujet reste au cœur des préoccupations. En effet, la loi prévoit que la Commission nationale du débat public (CNDP) soit saisie dès lors qu’un projet dépasse 600 millions d’euros d’investissement. Concernant la rentabilité du projet, les coûts de production de l’hydroxyde de lithium français devraient se situe entre 7 et 9 euros le kilo. Le prix de vente du lithium est actuellement autour de 70 euros le kilo. Sur ces niveaux de prix, le chiffre d’affaire annuel généré par cette seule mine devrait approcher 2,4 milliards d’euros. Le projet devrait donc être très rentable, en dépit de l’amortissement de l’investissement. Toutefois, ce projet reste en suspense en raisons des nombreuses contestations des écologistes sur ce « désastre écologique programmé ». Quoiqu’il en soit, l’avenir de ce projet semble être une magnifique opportunité pour pouvoir enfin rendre la France indépendante et souveraine concernant ses besoins énergétiques.

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Sangliers : Non, les chasseurs ne sont pas responsables

En 1973, les chasseurs français ont abattu 46 000 sangliers. Ils en ont prélevé 700 000 en 2018. Le constat est sans appel : les populations de sangliers explosent. Beaucoup d’idées reçues sur les causes de cette dynamique démographique sont entretenues par des groupes anti-chasse.

Qu’il s’agisse d’agrainage, de lâchers ou de croisements avec des cochons d’élevage, l’idée est toujours la même : les chasseurs sont responsables.

Pourtant, il suffit de faire quelques recherches pour s’apercevoir de la supercherie.

Le Sanglier

Avant toute chose, il est important de définir le sujet d’étude. « Sanglier » est un nom vernaculaire qui désigne différentes sous-espèces de Sus scrofa, une espèce de la famille des suidés, des mammifères « placentaires » de l’ordre des artiodactyles. En France, le doute n’est pas permis : la seule sous-espèce présente est Sus scrofa scrofa, le « sanglier d’Europe », pouvant atteindre 160 kg. Cet animal vit en groupes appelés compagnies. Il parcourt nos forêts depuis 700 000 ans.

Sus scrofa est un animal forestier, omnivore et très adaptable. Pourvu de canines très développées et d’une dentition bunodonte (comme les primates), son régime alimentaire s’étend des racines les plus coriaces à de petits animaux, en passant par des charognes. L’essentiel de son alimentation reste toutefois les fruits forestiers (glands, châtaignes, faines…).

Concernant la reproduction, Sus scrofa est encore une fois caractérisé par ses capacités d’adaptation. En effet, en fonction de son poids initial et des ressources alimentaires, la laie peut avoir entre 2 et 10 marcassins par portée. La période de gestation des femelles est de 18 semaines, soit 3 mois, 3 semaines et 3 jours. Les petits sont autonomes à partir de 6 mois.

Les arguments anti-chasse : florilège de désinformation

La plupart des anti-chasse et certains naturalistes prétendent que l’explosion démographique est imputable aux chasseurs français. Trois arguments principaux sont continuellement répétés, mais sont-ils pertinents ?

D’abord, les chasseurs relâcheraient des sangliers dans la nature pour renforcer les populations.

C’était effectivement une pratique très commune dans la deuxième moitié du XXe siècle, lorsque l’animal se faisait rare en France. Cependant, lorsque les populations ont commencé à progresser, les lâchers ont été soumis à autorisation préfectorale puis définitivement interdits en octobre 2022. Au vu des coûts des dégâts causés par cet animal, peu de lâchers ont vraiment eu lieu durant les 30 dernières années.

Méfiez-vous des images que vous croisez sur les réseaux sociaux à ce sujet : la plupart viennent de l’étranger.

Le deuxième argument classique est le nourrissage des sangliers par les chasseurs.

Il est vrai que les chasseurs épandent (en toute légalité) du maïs en forêt. Et, comme rappelé précédemment, la taille des portées des laies est corrélée aux ressources alimentaires. 

Seulement, ce maïs, le sanglier l’aurait mangé de toute façon, à la différence près que s’il n’avait pas été épandu dans sa forêt, il serait allé le chercher dans le champ voisin, en le saccageant au passage. L’agrainage dissuasif a ses limites mais a prouvé son efficacité.

Toutefois, il faut reconnaître que cette pratique connaît aussi des dérives. Malgré tout, leur impact reste marginal.

Le dernier membre de cette triplette malhonnête est le cochonglier. Selon eux, les chasseurs croiseraient des sangliers avec des cochons domestiques pour rendre les laies plus fertiles.

Cette affirmation est totalement gratuite et sans fondement. En effet, aucune étude n’a à ce jour établi que les hybrides étaient plus fertiles. De plus, les hybrides ne représentent que 3,6 % de la population de sangliers français et la responsabilité des chasseurs n’est que rarement mise en cause pour expliquer leur existence. 

Toutefois, la valeur sélective des hybrides serait vraisemblablement supérieure à celle des sangliers non croisés. leur proportion risque donc d’augmenter au fil du temps : à surveiller…

Sanglier : un problème mondial

Il aurait peut-être été plus simple de se contenter de rappeler que la dynamique démographique actuelle du sanglier en France est la même que partout dans le monde : proche Orient, Maghreb, Asie, Amérique, etc. Qu’il s’agisse de Sus scrofa ou d’autres suidés sauvages au mode de vie similaire, les populations connaissent la même progression démographique et apportent les mêmes problèmes, où qu’ils se trouvent. 

Pointer du doigt une cause locale à un phénomène mondial étant absurde, les chasseurs français ne sont donc pas les responsables de cette situation.

Mais alors, où chercher les responsables ?Les organismes sérieux qui se sont penchés sur la question désignent des causes bien différentes.

Le réchauffement climatique est la première chose qui vient à l’esprit. D’une part, les étés plus chauds stimulent la production de fruits forestiers, pilier de l’alimentation des sangliers. D’autre part, les hivers plus cléments épargnent d’avantages les marcassins, dont la mortalité baisse.

En France, l’anthropisation des campagnes en est une autre. Les champs représentent des réserves de nourriture et d’eau tandis que les zones périurbaines constituent de véritables réserves.

Bois ou forêt : forêt vous la différence ?

Le 21 mars était la journée internationale des forêts. Ce jour est l’occasion de mettre en avant ce patrimoine naturel et humain, plus précieux que jamais.

On s’aperçoit aussi qu’il existe plusieurs mots en français pour désigner ce patrimoine, les deux principaux étant « bois » et « forêt ». Il semble parfois difficile de faire la différence entre ces deux termes.

Quelle meilleure occasion que la journée internationale des forêts pour aborder les différences entre eux, et surtout, l’importance de les préserver ? Alors, bois ou forêt ?

Bois ou forêt : comment les reconnaître ?

Pour comprendre les différences entre bois et forêt, il faut remonter à l’origine de ces mots, au Moyen Âge.

Apparue au XIIe siècle sous la forme « forest », la forêt était un espace semi-légendaire, très dense et aux utilités très spécifiques : chasse, ressources alimentaires mais aussi bois de chauffe et de construction.

Le bois était lui bien plus clairsemé, plus fréquenté et répondait à des besoins moins divers, le bois de chauffe et le bois de construction étant ses principaux emplois.

De nos jours, la frontière entre forêt et bois est devenue plus floue. 

Selon la FAO, institut des Nations unies en charge de l’alimentation et de l’agriculture, une forêt est un espace boisé d’au moins 0,5 hectare, peuplé d’arbres d’au moins 5 mètres de haut et d’une couverture de canopée d’au moins 10 %.

Le bois, lui, n’a pas de définition officielle, les sources se contredisent. Généralement, on considère qu’il a une plus petite superficie et qu’il est plus clairsemé qu’une forêt.

Quelles différences de Biodiversité ?

Cette différence de densité n’est pas sans effets. Par exemple, plus une forêt est dense, plus son cœur est isolé de la température extérieure : un genre de microclimat, plus stable qu’en dehors, caractérise cette forêt. 

Ainsi, on ne retrouve pas non plus la même biodiversité dans une forêt et dans un bois. En effet, la faune rencontrée en forêt diffère de celle des zones boisées : beaucoup d’espèces ont des niches écologiques très spéciales, qui demandent des paramètres bien précis. 

Mais c’est surtout la flore qui en est bouleversée.

En forêt, on rencontre principalement deux morphotypes d’arbres : les très grands, qui atteignent la canopée, et les très petits, d’à peine quelques centimètres de haut. Les arbustes, de taille intermédiaire, s’y font rares, par manque de lumière, et s’épanouissent plutôt dans les bois. 

Il en va de même pour la plupart des autres plantes : seules les très petites et les plantes grimpantes (lierre, vignes) parviennent à y prospérer. Les autres se retrouvent davantage dans les bois, plus généreux en lumière.

Ainsi, la forêt, comprenant un nombre supérieur d’individus, comporte une meilleure diversité et des effectifs plus importants d’arbres. Le bois, lui, est compensé par une plus grande diversité de morphotypes et d’espèces de plantes en général.

Des richesses à protéger

Ces deux milieux, malgré leurs différences, font face à des menaces semblables et bien connues : changement climatique, espèces invasives, ravageurs et maladies affaiblissent les forêts, dont certaines sont déjà mises en péril par la déforestation.

Il est pourtant capital de les protéger. De nombreuses forêts sont aujourd’hui considérées comme des « hotspots » de biodiversité, des zones de grand intérêt biologique menacées par des activités humaines. Une part considérable de la biodiversité terrestre y est concentrée.

Selon la FAO, elles abritent 80 % des espèces d’amphibiens, 75 % des espèces d’oiseaux et 68 % des espèces de mammifères, en plus d’êtres d’impressionnants puits de carbone.

Ne soyons pas défaitistes

Il y a tout de même de l’espoir : la déforestation semble ralentir tandis que de vastes projets de reboisement voient le jour. Certes, nous ne sommes pas encore parvenus à planter plus d’arbres que nous n’en coupons, le monde perd des forêts chaque année, mais les dynamiques donnent à croire en l’avenir.

arbres haute marne

Oui, les arbres ont leur place au bord des routes

Sans doute en avez-vous entendu parler : le jeudi 8 février 2024, le conseil départemental de Haute Marne a lancé un plan d’abattage des arbres bordant les routes du département. La raison ? Ces arbres sont impliqués dans de nombreux accidents de la route, 10% des accidents mortels. Le président du conseil, Nicolas Lacroix, s’exprime en ces termes : “Les arbres qui tuent n’ont plus leur place au bord de nos routes !”. Cette décision a logiquement fait polémique.

Il y a beaucoup de choses à dire à ce sujet. Avant toute chose, rappelons que ce plan d’abattage concerne en partie des arbres malades, qu’il est nécessaire de couper pour des raisons évidentes de sécurité routière. Précisons également que le département n’a pas prévu de couper tous les arbres bordant ses routes départementales : les 4000 arbres concernés vont faire “l’objet d’un diagnostic » selon les dires du conseil

Mais ce diagnostic, quels en seront les critères ? Le communiqué départemental n’en dit pas plus à ce sujet. Il n’est question que “d’arbres dangereux”. Qu’est-ce que cela signifie ? En quoi un arbre, immobile par définition, peut-il être dangereux s’il n’est pas malade et ne menace pas de tomber ? Ces questions n’ont pas de réponses dans le communiqué, mais si on suit sa logique, il doit s’agir des arbres impliqués dans des collisions avec des véhicules.

On touche là du doigt le gros problème de cette décision : l’inversion totale et absurde de l’ordre des responsabilités. NON, ce ne sont pas les arbres qui sont responsables, mais les automobilistes qui perdent le contrôle de leurs véhicules. 

Cela ne veut pas dire qu’il ne faut rien faire pour protéger les automobilistes, mais de meilleures solutions, qui peuvent satisfaire tout le monde, existent : les glissières de sécurité par exemple, ne sont pas infaillibles, mais elles ont prouvé leur efficacité. 

A la fin de son communiqué, le conseil départemental essaye d’ajouter un argument supplémentaire : la déformation des chaussées, qui causent également des accidents. Seulement, ces déformations sont le fait des racines. Si couper le tronc d’un arbre ne demande qu’une tronçonneuse, le déraciner n’est pas une mince affaire. Pas sûr que les usagers soient très satisfaits de voir leurs routes fermées pour cause de travaux pour résorber quelques bosses sur les routes…

Pour conclure son communiqué, le département s’engage à compenser les pertes de biodiversité induites par ces abattages. Y gagne-t-on au change ? C’est l’occasion de nous poser une question : pourquoi plantons-nous des arbres le long des routes ?

D’abord plantés au XVIe siècle pour fournir le royaume en bois de bonne qualité, l’initiative a été poursuivie au siècle suivant pour stabiliser les chaussées. L’empereur fit de même afin de fournir de l’ombre à ses troupes lorsqu’ils marchaient sous un soleil de plomb. Ils ont bien failli disparaître sous Pompidou, déjà pour des raisons de sécurité routière. Le président lui-même est intervenu pour les protéger.

De nos jours, les raisons du maintien des arbres ont quelque peu changées. Si l’ombre est toujours un argument en vigueur, d’autres se sont ajoutés. Leur capacité à capter le CO2 de nos voitures vient en premier en tête, mais ils ont aussi un impact positif sur la santé mentale humaine.  

On peut se réjouir de voir tant de personnes, peu impliquées dans la défense de l’environnement, critiquer cette décision.

Vendée : 452 000 arbres plantés par les chasseurs en 20 ans

Peut-on faire confiance aux chasseurs en matière d’écologie et de Biodiversité ?

Les premiers écologistes de France. Voilà une façon d’appeler les chasseurs qui fait couler beaucoup d’encre dans les milieux environnementalistes. Pourtant, si ce statut est sans doute un peu exagéré, il ne sort pas de nulle part et devient assez légitime quand on prend la peine de creuser un peu.

Les chasseurs : des agents de terrain actifs 

Tout d’abord, il est important de rappeler que même si vous soupçonnez les chasseurs d’être hypocrite, de ne pas vraiment aimer la Nature, vous ne pouvez pas nier un fait : leur passion repose sur une Nature riche et en bonne santé. Les chasseurs sont donc dignes de confiance sur ce sujet, au moins par intérêt : pas de nature, pas de gibier ; pas de gibier, pas de chasse.

Cet argument se vérifie d’ailleurs sur le terrain et dans l’histoire. Dès le Moyen-âge, c’est leur passion de la vènerie qui poussa les nobles à protéger leurs forêts et leurs équilibres. De nos jours, les chasseurs plantent chaque année des kilomètres de haie, habitat de choix pour certains gibiers, partagé avec d’autres animaux. On pourrait dire qu’en France le gibier fait office d’espèce parapluie. 

Vendée : 452 000 arbres plantés par les chasseurs en 20 ans

En biologie de la conservation, on appelle espèce parapluie une “espèce protégé dont l’étendue du territoire ou de la niche écologique permet la protection d’un grand nombre d’autres espèces”. En France, les chasseurs sont attentionnés à l’égard des milieux de vie du gibier, qui abrite de nombreuses espèces non chassées : celles-ci bénéficient alors aussi des milieux maintenus viables par les chasseurs. On peut penser, par exemple, à la chasse au gibier d’eau, qui maintient en bon état de nombreux hectares de zones humides, qui profitent à des espèces non chassées (héron, aigrettes…).

Néanmoins, cet argument trouve ses limites lorsqu’il s’agit de certains animaux, des prédateurs par exemple, qui peuvent être assimilés à des concurrents, comme les loups ou certains rapaces. L’objectivité des chasseurs est alors remise en question, trop souvent à juste titre : il n’est pas très sérieux de se défendre des accidents de chasse en arguant qu’ils sont très rares (ce qui est vrai) pour s’inquiéter ensuite des attaques de loup (tout aussi rares).

La chasse s’inscrit parfaitement bien dans un mode de vie écolo

Toutefois, être écolo ne consiste pas uniquement à faire des actions bénévoles en faveur de l’environnement. Il s’agit d’abord d’avoir un mode de vie sobre et peu polluant. Or, s’il y a une denrée de base critiquée pour son empreinte carbone, c’est bien la viande. Il y a pourtant un moyen simple pour manger de la viande éthique et décarboné : la venaison. 

La viande de chasse, aussi appelée venaison, a plusieurs avantages. Elle est avant tout bas carbone. En effet, qu’elle soit d’origine sauvage ou d’élevage, la venaison nécessite moins de ressources, moins d’énergies fossiles et est issue d’animaux émettant moins de carbone que la viande d’élevage classique.  

C’est également une viande plus éthique. Plus respectueuse du bien-être animal car vivant en liberté ou bien élevé en plein-air ou en volière. Plus durable, dans une France où les populations de grands ongulés augmentent chaque année et dont la chasse permet de maintenir l’équilibre sylvo-cynégétique des forêts. Qui plus est, elle est également plus responsabilisante quand on prend la peine de la chasser et de la préparer soit même. On ne regarde plus de la même façon la viande lorsqu’on a déjà tué, vidé et préparé un animal…

Pour conclure

Les chasseurs sont donc bel et bien des écologistes de premier ordre : pionniers de la protection des forêts, bénévoles infatigables, ils sont surtout des pratiquants actifs d’un mode de vie écologique. Toutefois, au vu des ressources naturelles qu’ils exploitent, il est inconcevable de penser que les français vont massivement adopter la venaison comme première source de protéines animales. 

Cela reste pourtant un premier pas intéressant pour ceux qui veulent décarboner leur alimentation. Certains donneurs de leçon devraient songer à s’y mettre : alors les écologistes, quand est-ce qu’on passe notre permis ?

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Ecolo contre chemin de fer, ça commence à bien faire !

La LGV Lyon-Turin ou quand les « écolos » déraillent 

Disclaimer 

Mesdames et messieurs, chères lucioles, l’embarquement de notre train en destination de l’Absurdistan est bientôt terminé. Et les idéologues de s’empresser d’y faire monter les plus crédules. De monter au créneau contre la construction d’une ligne ferroviaire, qui doit relier Lyon à Turin. J’entends déjà les critiques venir : “Comment, vous qui vous dites lucides, vous osez défendre un projet industriel ? Vous osez critiquer les militants ? Vous osez critiquer la mobilisation des Soulèvements de la Terre ?” Avant de poursuivre, je pense que nous n’avons eu de cesse de vous témoigner de notre engagement écologique sincère. Mais toujours au nom d’une écologie qu’on s’efforce de rendre lucide. Et de lucidité certains en manquent. Surtout quand calcul politique et manipulation de bas étage s’en  mêlent. Sans oublier certains médias qui n’en sortent pas grandis… Mais lançons-nous. 

Aux origines de Lyon-Turin 

La Transalpine, ou liaison ferroviaire entre Lyon et Turin, est un projet de ligne de chemin de fer mixte voyageurs/fret à travers les Alpes. À l’origine la ligne est une idée de Louis Besson, maire de Chambéry dans les années 1980. Mais le projet stagne. Tout s’accélère à partir de 1999. Incendie du tunnel du mont Blanc, 39 morts. Le trafic routier est reporté sur la vallée de la Maurienne. Problème : 5000 camions défilent quotidiennement. Bonjour la pollution, et les axes de circulation saturés. Ce qui est assez mal vécu. Côté italien comme côté français, le projet commence à fédérer, collectivités territoriales, élus, et ministres (Michel Rocard par ex). Après enquête, le projet est déclaré d’utilité publique en 2013.

Ça donne quoi ? 

Le projet est très complexe, alors laissons parler les cartes. En vert et bleu, les plans des futures sections comparées aux lignes existantes en noir. 

L’intérêt écologique de Lyon-Turin 

La nouvelle liaison s’étendrait sur environ 270 km. La section française s’étend jusqu’à Saint-Jean-de-Maurienne (140 km), et la partie franco-italienne subventionnée en partie par l’UE. Cette dernière comprend notamment le tunnel de base du mont Cenis, long d’environ 60 km. La partie française de la ligne franchira notamment 8 tunnels et 6 viaducs. Le coût total du projet est estimé à une bonne vingtaine de milliards d’euros, dont un peu plus de 8 pour la partie franco-italienne. 

Certes me direz-vous, mais quel est l’intérêt écologique de cette ligne ? Premièrement, le temps de transport. La nouvelle liaison voyageurs à grande vitesse permettra de relier Lyon à Turin en 1 h 45 contre environ 4 h actuellement, et même Barcelone à Milan en 6 h 30 au lieu de plus de 12. Un argument de plus pour prendre le train, ce qui déchargerait par exemple la ligne Lyon-Grenoble (saturée) en dégageant des sillons bienvenus pour le trafic des TER.

Mais au-delà des voyageurs, l’énorme intérêt c’est le transport des marchandises bas carbone : plus de 50 millions de tonnes de marchandises pourraient être transportées par train. Aujourd’hui, environ 40 millions de tonnes de biens marchands s’échangent déjà entre la France et l’Italie, sauf que les flux ferroviaires ne représentent plus que 4 millions de tonnes, contre 11 auparavant. Les camions se taillent la part du L(y)on. Pourquoi cet effondrement ? La désindustrialisation, mais surtout la concurrence de la Suisse, qui a largement subventionné son rail. Et la concurrence ça fait du dégât. 

Du gaspillage, vraiment ? 

À en croire Mathilde Panot, Lyon-Turin, « c’est un projet écocidaire et de gaspillage de l’argent public ». Les arguments principaux contre la Transalpine les voici : 

Le projet serait un gouffre financier : parce qu’arrêter le projet ne serait pas un énorme gâchis ? Au contraire, les coûts ont pour l’instant globalement été maîtrisés, et sont assez cohérents avec ce qu’ont fait les Suisses à Saint Gothard. La Cour des comptes a même calculé une rentabilité de 4 %. 

On aurait d’autres options. Pour les opposants, la ligne existante qui passe par le tunnel de Fréjus serait largement suffisante. Problème : sa capacité journalière de 50 trains est insuffisante, loin des 120 qui pourraient transiter par le tunnel du mont Cenis. De plus, les fortes pentes du tunnel de Fréjus, ses virages serrés et sa hauteur, ses sections à moins de 30 km/h sont insuffisants pour accueillir des trains de 2000 tonnes. Autrement dit : le transport y est donc plus coûteux, donc bien moins compétitif que le transport en camion. 

Inutile et dangereux ? 

Le projet serait inutile faute de trafic suffisant, un trafic qui serait surestimé : Que l’on surestime ou sous estime le trafic, il y a forcément des incertitudes.  La ligne TGV Grand Est avait par ex largement dépassé les attentes, et côté suisse le trafic ferroviaire a plutôt bien  suivi les importants investissements consentis. Quoi qu’il en soit, se doter d’un rail compétitif est une condition indispensable à la relocalisation industrielle, face à la concurrence des ports mondialisés. 

Un projet qui assècherait la montagne :  Contrairement à ce que certains médias veulent laisser croire, la construction de la Transalpine ne va pas assécher la montagne (cc Reporterre !). Dans le passé, des milliers de kilomètres de tunnels ont déjà été creusés dans les Alpes, sans qu’on constate pour autant un assèchement. Sur 170 points de mesures, seuls 9 présentent des perturbations, mais on parle ici de légères diminutions de débit.  

La dangerosité : certains se sont alarmés d’une potentielle présence d’amiante dans les galeries, mais à nouveau, rien n’a été détecté en creusant les tunnels de reconnaissance…

A deux doigts de découvrir que tout a un impact 

 Il est évident que construire une telle ligne a aussi un impact négatif sur l’environnement. Mais ce qui  n’a pas d’impact, ça n’existe pas. Et ça vaut pour  le nucléaire comme pour l’éolien. Alors on fait ce qu’on veut ? Non car en matière d’environnement, on établit entre différents scénarios un ratio avantages/inconvénients. Pour la Transalpine, le  Conseil général de l’environnement et du Développement Durable, estime que son poids CO2 ne sera compensé qu’en 2037 à l’issue des travaux.  

Doit-on pour autant renoncer à un projet qui bénéficiera à tant de générations ? Serait-on assez naïf pour vouloir la fin du commerce transalpin ? Voudrait-on se priver d’une opportunité de relocalisation industrielle ? Croit-on vraiment que les camions traverseront les Alpes avec du carburant 100 % bio entre-temps ? Oublie-t-on qu’un accident de camion le long du lac du Bourget entrainerait des conséquences catastrophiques sur ce grand réservoir d’eau douce? 

Chaos ou résilience, il faut choisir 

On arrive au coeur du problème : du même ordre d’argument que les opposants au nucléaire finissent toujours par ressortir, une fois bon nombre de leurs arguments écartés : “oui ok mais avec ça vous allez juste alimenter la fuite en avant vers une société qui consomme toujours plus. La seule issue c’est de décroître” Je n’ai rien contre la décroissance, mais je pense qu’elle relève de la paresse intellectuelle lorsqu’elle est systématique. Au contraire, nos sociétés auront besoin d’aménagements durables pour amortir les conséquences de la crise écologique. C’est ce qu’on appelle la résilience. Et le train a son mot à dire.  

Mais ne soyons pas naïf, le train n’est pas une fin en soi. Parce que cette nouvelle ligne doit s’inscrire dans une politique d’ensemble.  Parce que cette ligne aura un réel intérêt à condition d’un report modal du camion vers le train. Ce qui demandera un peu de volonté politique. 

Complaisance médiatique et opportunisme politique 

Désinformation, polarisation du débat, instrumentalisation, la Transalpine n’a pas été épargnée. Une brèche dans laquelle les Soulèvements de la Terre, LFI, EELV et tant d’autres, se sont engouffrés. Là où le projet fédérait jusqu’ici à droite comme à gauche, certains préfèrent faire avancer leur agenda politique

Et mentir ne fait pas peur : plus c’est gros, plus ça passera. En témoignent, les Soulèvements de la Terre qui ont revendiqué 50 blessés grave lors d’une manif anti-Transalpine en Maurienne. Sauf que ces blessés, les secouristes présents sur place les cherchent encore. L’idéologie aveugle, quitte à supplanter intérêts économiques, sociétaux et environnementaux. Oui la Transalpine n’est pas parfaite, mais ses multiples avantages pèseront bien peu face aux saboteurs du débat public. A nous de rétablir un peu de lucidité. 

Biblio : 

https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-edito-eco/l-edito-eco-du-mercredi-21-juin-2023-2890288

https://www.lepoint.fr/faits-divers/manifestation-anti-lyon-turin-des-dizaines-de-victimes-introuvables-20-06-2023-2525188_2627.php

https://www.nouvelobs.com/ecologie/20230621.OBS74801/lgv-lyon-turin-pourquoi-les-militants-ecolos-s-opposent-au-projet.html

« EU transport infrastructures: more speed needed in megaproject implementation to deliver network effects on time » [archive] [PDF], sur Cour des comptes européenne, 2020, p. 30.

https://www.lepoint.fr/environnement/tunnel-lyon-turin-le-vrai-du-faux-17-06-2023-2524818_1927.php

https://www.transalpine.com/documentation/document-officiels/conclusions-de-la-commission-denquete-publique-de-la-liaison