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Le régime végan est-il vraiment sain ?

Depuis plusieurs années, le mouvement sans viande est apparu, en conséquence directe du développement de l’industrie de l’élevage En Occident du moins, la proportion des personnes adoptant des régimes non carnés augmente de plus en plus. En 2020, en France, ils étaient 2,2% selon l’Ifop. Pourtant, l’on en parle abondamment, d’une part pour vanter les mérites écologiques et pour la santé, et d’autre part pour décrier ce régime qui serait anormal et qui ne répondrait pas à nos besoins.

Tout d’abord, l’alimentation des Français est diverse. Et si 74% se déclarent omnivores, il est évident que tous ne s’alimentent pas de la même manière. De plus, il faut bien cerner les différentes nomenclatures de tous ces régimes. Entre végétarien, végétalien, flexitariens et autre, on s’y perd facilement. En voici quelques-uns :

  • Régime omnivore : composé d’aliments d’origine animale et végétale.
  • Régime flexitarien : principalement végétarien, mais incluant occasionnellement de la viande ou du poisson (pas de définition universelle).
  • Régime végétarien : sans viande ni poisson. On retrouve toutefois des produits d’origine animale tel que du lait.

Régime végétalien (végan) : sans aliments issus de l’exploitation animale (y compris le lait et les œufs).

C’est ce dernier qui nous intéresse : est-il adapté à l’homme ? N’y a-t-il pas de risque de carence alimentaire ?

Le saviez vous ? Il y a seulement 0,3% de Français ayant adopté un régime végetalien (végan). Étude Végétariens et flexitariens en France en 2020, Ifop.

« Pas de risques a priori »

Pour la Professeur Irène Margaritis, chef de l’unité d’évaluation des risques liés à la nutrition à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses), « ce régime en lui-même ne présente a priori pas de risque s’il est bien pratiqué, mais cela nécessite une vigilance toute particulière et de se faire aider par un médecin nutritionniste ou un diététicien » Et d’ajouter qu’ « un régime végétalien suivi sans connaissances peut avoir des conséquences dramatiques ». L’alimentation est un savant calcul auquel peut aussi bien répondre l’omnivorisme que le végétalisme. Néanmoins, ce dernier est plus difficile à mettre en place à l’heure actuelle du fait d’un manque de connaissance, d’une production alimentaire dirigée vers la demande en viande ainsi que de la culture française où la viande est très représentée.

Dans sa vidéo YouTube "VEGAN PENDANT 1 MOIS : J'ARRÊTE TOUT ?!", Eric Flag (coach en développement physique et mental) change radicalement de régime et livre une conclusion plutôt favorable en insistant sur le fait de notamment adapter ses apports caloriques.

Selon Santé Publique France, le régime végétalien n’est « pas adapté pour tout le monde ». Ou plutôt, les carences s’accumulent chez les plus fragiles (femmes enceintes et enfants en bas âge). Des carences pouvant cependant tout à fait être comblées par des produits alternatifs ou des compléments alimentaires. En outre, le fer, le calcium, l’iode, les vitamines D et B12 ou même les protéines ne sont pas le monopole des produits carnés. Benjamin Allès, chargé de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (Inra), expliquait à Libération en 2018 : « Une première étude aux Etats-Unis rapporte que des individus qui consomment beaucoup de produits végétaux transformés et peu de produits bruts se retrouvent avec de plus forts risques de maladies cardiovasculaires tout comme les individus qui consomment beaucoup de produits animaux transformés » (ici, une étude de juillet 2017 penche en ce sens, peut-être est-ce celle que le chercheur a mentionnée). Ainsi, il n’y a pas de régime miraculeux. Tout dépend de son application.

« Plusieurs caractéristiques des aliments ultra-transformés conduisent à penser qu’ils pourraient avoir des effets négatifs sur la santé, comme le suggèrent une vingtaine d’études épidémiologiques publiées récemment en France et à travers le monde »

Tout est question d’équilibre

A l’heure où 59% des adultes et près d’un enfant sur trois sont aujourd’hui en surpoids (IMC>25) ou obèses (IMC>30), l’enjeu sanitaire est avant tout de manger plus équilibré, ce que n’assure aucun régime en lui-même. On imagine mal expliquer qu’un enfant nourri au Big Mac est en meilleure santé qu’un autre végétalien suivi par un nutritionniste (toutes choses égales par ailleurs, évidemment).

En Europe, 59% des adultes et près d'un enfant sur trois sont aujourd'hui obèses ou en surpoids.

En résumé, le régime végan est un régime difficile à s’approprier à l’heure actuelle. Celui qui s’en saisit doit impérativement connaitre ses besoins alimentaires par le biais – du moins temporaire – d’un professionnel de la santé. Néanmoins, le régime végétalien à un autre avantage inhérent à sa nature : il exclut la consommation de produits d’origine animale dont leur production est responsable d’importantes pollutions de l’environnement notamment par le biais de gaz à effets de serre (l’élevage est responsable de 15 % des émissions de GES dans le monde).

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Les éoliennes représentent-elles un danger pour notre santé ?

Parfois désignées comme les grandes profanatrices de notre paysage, de notre faune et de notre souveraineté, les éoliennes seraient encore plus diaboliques et impacteraient notre santé. Sans renier que certaines installations sont plus impactantees que d’autres parmi un tas de facteurs objectifs pouvant détériorer notre santé, et que donc certaines luttes anti éolienne sont tout à fait légitimes, on peut remettre en cause les nouveaux dogmes farfelus d’une minorité d’anti éolien. Qu’en est-il réellement ?

Si vous habitez à la campagne, vous avez peut-être déjà vu, aux abords d’un bourg ou d’une rue passante, des panneaux protestant contre des projets éoliens qui poussent tel des champignons en France. Les éoliennes inquiètent. Concernant notre santé, deux de nos sens seraient particulièrement impactés selon certains : la vue et l’ouïe. En outre, les éoliennes, quand elles tournent (soit plus de 80% du temps selon EDF), interfèrent avec les rayons du soleil, ce qui produit un effet stroboscopique. De plus, elles émettraient des sons gênants, que ce soit par le bruit des pales qui brassent le vent ou par les infrasons qu’elles produisent.

Que prévoit la loi française ?

En premier lieu, il est nécessaire de préciser qu’un cadre législatif entoure la mise en place d’un parc éolien. La loi prévoit des études acoustique, paysagère et écologique. D’autres aspects peuvent également être étudiés, notamment la réception tv, la géologie ou les ombres portées. Aussi, doit être menée une « enquête publique avec affichage dans un rayon de 6 km autour du lieu envisagé pour l’implantation des éoliennes ». Cette consultation des riverains est une occasion d’user de son pouvoir citoyen et elle conduit souvent à la réalisation d’études supplémentaires. Néanmoins, les études sont très souvent contestées ; les habitants sont assez peu confiants quant à la justesse de ces dernières. Parfois, les résultats d’études non obligatoires ne sont d’ailleurs pas publiés.

De plus, il se pose la question de la légitimité des études. Par exemple, la géobiologie n’est pas reconnue comme étant une science (même si certains travaillent pour l’Etat). Cette technique pourrait servir à détecter les courants d’eau souterrains et palier aux risques de transmissions de courants électriques. C’est en tout cas ce qu’explique Olivier Ranchy, conseiller en géobiologie à la Chambre d’agriculture Pays de la Loire – on résume couramment son travail par l’appellation de « sourcier ». « Lorsqu’elles [les éoliennes] sont implantées dans une zone neutre sans faille ni cours d’eau, le risque est minime. En revanche, la construction d’une fondation avec 50 tonnes de ferraille et 100 toupies de béton (1 200 m3) peut entraîner des perturbations plus ou moins fortes si une veine d’eau court jusqu’au bâtiment d’élevage en transportant l’électricité », expliquait-il à Ouest France. Que l’on croit ou non à cette pseudo science, l’enjeu soulevé par le « sourcier » reste le même : mieux sonder le sous sol des projets éoliens afin de prévenir les risques liées à la santé des humains, mais aussi des animaux.

Hormis les doutes – parfois très peu fondés -, les études d’impacts et de dangers couvrent une bonne partie des effets potentiellement néfastes des éoliennes. Et pourtant, nombre de facteurs qui font l’objet de ces études continuent d’être pointés du doigt. En plus de ces études sur des cas particuliers, il faut ajouter les études et recherches à plus grande échelle. Mais, semble-t-il, qu’importe les articles scientifiques, les meta-analyses, l’humain semble plus sensible aux cas extrêmes, à fortiori s’ils sont partagés par des proches – pas plus spécialistes pour autant.

L’effet stroboscopique

Si l’effet stroboscopique produit par les éoliennes ne conduit pas directement à des problèmes de santé, il peut néanmoins être un vecteur de stress. Mais le poids de ce phénomène nous apparait bien diminué dès lors que l’on ajoute qu’il n’apparait qu’un temps réduit dans l’année du fait de la position du soleil par rapport à l’habitation. Selon le journal Le Monde, des flashs lumineux n’apparaitraient « qu’en moyenne 3/4 d’heure par jour 3 mois par an ». Soit autant que nombre d’activités gênantes, telles que sa sœur mettant de la Kpop dans la maison par exemple. On pourrait aussi ajouter qu’on s’y habitue, mais on s’habitue aussi aux défaites de Saint Étienne, sans pour autant qu’on s’en réjouisse. De plus, les pales des éoliennes devraient tourner 3 fois plus vite (et les bouts de ses pales atteindraient le mur du son !) pour que les effets stroboscopiques deviennent dangereux pour les épileptiques.

Ce phénomène est donc sur exagéré : il ne conduit pas à des problèmes de santé dont l’éolien serait novateur ou aurait l’exclusivité, sans toutefois qu’il soit un non-évènement et ne puisse pas être désagréable.

En même temps qu’elles tranchent la lumière d’Hélios, les pales des éoliennes se confrontent à une autre divinité grecque : Éole. Le lien qu’elles entretiennent avec lui est tout indiqué, puisque c’est ce dernier qui leur confère leur nom et l’énergie mécanique nécessaire à nos besoins – ou envies – électriques. Malheureusement, ce procédé est bruyant. Aux pieds d’une éolienne tournant à plein régime, les « woush » sont impressionnants (55 dB). Mais à 500m – soit la distance minimum légale entre une éolienne et une habitation – le bruit est bien moins audible (environ 35 dB ; sans compter que le volume varie en fonction de la topographie, de la végétation, etc.), et serait même moins fort qu’une conversation à voix basse selon l’Ademe. A noter que les éoliennes les plus récentes sont moins bruyantes car plus aérodynamiques. Le « problème sonore » tendrait donc à se réduire.

Ajoutons également que les chercheurs prennent très au sérieux l’installation des éoliennes et leurs conséquences sonores. J’en veux pour preuve le projet PIBE qui a pour objectif « d’améliorer les méthodes de prévision de l’impact sonore des éoliennes et d’étudier des solutions de réduction du bruit et leur efficacité, aussi bien en conditions maitrisées qu’en conditions réelles ».

Une sensibilité biologique et psychologique

Et ce n’est pas une mince affaire. En outre, nous ne sommes pas égaux face aux bruits : notre sensibilité n’est pas la même. De manière purement biologique – notre capacité à entendre – mais aussi de manière psychologique. Loin de dire que le bruit des éoliennes n’existe que dans l’imagination des riverains, il me parait probable (et des études citées plus bas le concluent de manière similaire) que plus on est soumis à un discours anti éolien, plus le bruit des éoliennes est amplifié, virtuellement. En réalité, ce n’est pas le bruit objectif qui nous gène mais notre perception de celui ci. Il pourrait même jouer le rôle de bouc émissaire ; on se plaindrait du bruit pour ne pas avoir à critiquer un autre aspect moins critiquable de l’éolienne.

La critique de l’éolien régulée selon le groupe

Critiquer le bruit est une interrogation légitime, socialement bien accueillie par tous, contrairement à la critique de l’éolienne selon l’émission de pseudos infrasons par exemple. Illustrons ce propos : imaginons qu’une personne vote régulièrement pour le FN, un parti qui se caractérise par une approche extrêmement critique des éoliennes et plus encore de la technologie éolienne elle-même. Un jour, cette personne apprend qu’un parc éolien est en projet à côté de chez elle. Il lui faut réagir, et il est bien plus tolérable d’arriver dans le débat avec l’argument du bruit ou de l’esthétique qu’avec celui, bien plus politique et radical, qui conviendrait à bannir tout projet éolien, où qu’il soit construit.

Pour continuer à débattre et donner son opinion entre pairs et ne pas paraitre trop éloigné, trop extrême, il est préférable de s’adapter et d’opter pour une réponse mieux acceptée – mais pas moins contestable. En somme, il existe une sorte de contrat implicite entre tous les membres du groupe qui définit les critiques acceptées. Mais nous nous éloignons quelque peu du sujet ; retenons ici que le bruit ou l’esthétique ne sont parfois pas les réelles inquiétudes des individus. Parfois, on peut pointer du doigts d’autres nuisances induites par les éoliennes, des nuisances qui font l’objet de bien peu – voire pas du tout – de reconnaissance scientifique.

Infrasons nocifs

Ce qui inquiète parfois davantage dans les chaumières, ce n’est pas ce qu’on entend, mais ce qu’on n’entend pas. Paradoxal ? Point du tout ! Il faut savoir que, comme de nombreux appareils de la vie courante (machines à air conditionné, frigos, voitures, subwoofer, …) et même à la manière de la nature (tonnerre, vagues, tornades, vent…), les éoliennes produisent des infrasons, des sons inférieurs à 20 hertz. Bien qu’inaudibles, nous pourrions en subir les conséquences. Mais comme le rappelait l’institut national de recherche et de sécurité (Inrs) en 2006, « les effets physiologiques des infrasons, comme ceux de tous les bruits, dépendent du niveau reçu ». C’est surtout le monde du travail – et plus précisément le milieu ouvrier, là où les usines contiennent de nombreuses machines émettrices d’infrasons – qui serait impacté. Les éoliennes sont loin d’avoir le monopole des infrasons ; dans un village de Saône-et-Loire, on ne sait même pas ce qui provoque les infrasons. Mais à la différence de l’océan ou des usines par exemple, les éoliennes touchent à un domaine plus sensible, celui du privé et de la campagne. D’ailleurs, c’est souvent un critère d’installation : la campagne est réputée pour être silencieuse en contraste avec la ville bruyante. Le moindre soupçon d’infrason est donc rendu intolérable, d’autant plus que l’éolienne « envahit », à contrario de la mer, du vent dans les arbres ou des machines dans les usines qui précèdent notre venue. De ce point de vue, l’éolien est davantage comparable à la voie express.

Néanmoins, avec l’avènement des éoliennes, on s’est légitimement demandé quelle conséquence les infrasons que ces dernières produisent pourraient avoir sur notre santé. On peut d’ailleurs préciser que si « éolienne » semblent être le terme le plus usité pour parler de ces installations, certains opposants préfèrent parler de « machines industrielles » afin de contraster avec l’image écologique et toute verte que l’on pourrait s’en faire. Oui, l’éolienne est une machine en plein air, mais leurs conséquences sont-elles similaires à celles que subissent les ouvriers par exemple ?

Le syndrome éolien

Des études ont donc été menées afin de déterminer si les éoliennes provoquaient des troubles physiologiques sur les habitants à proximité.

En 2009, le Docteur Nina Pierpont autopublia une étude aussi erronée que bouleversante intitulé Wind Turbine Syndrome: A Report on a Natural Experiment, lequel mettait en lumière 12 symptômes qui, regroupés, forment le syndrome éolien (ou Wind Turbine Syndrom, WTS). Si elle n’a jamais été publiée dans une revue scientifique et validée par d’autres scientifiques, cette étude a joui d’une importante popularité chez les anti-éoliens, qui brandissent l’ouvrage sans cacher leur joie de pouvoir citer un docteur. Le gros problème de cette étude est la méthodologie. L’étude s’est seulement concentrée sur 10 foyers, soit 38 individus qui ont été confrontés à des éoliennes. Il a été étudié leur situation avant, pendant et après leur exposition aux éoliennes. Dans ces familles, au moins une personne devait, entre autres, « être gravement affecté par le fait de vivre près des éoliennes et devaient avoir pris des mesures drastiques pour se protéger de l’exposition aux éoliennes ». Nina Pierpont a donc délibérément choisi des personnes convaincues de la responsabilité des éoliennes sur leur état de santé.

En plus d’être basée sur une méthodologie plus que douteuse donc, l’étude s’appuie sur une explication simpliste : les éoliennes sont nocives car quand les habitants partent de leur domicile, ils n’ont plus de symptômes. Mais en lisant l’article de L’Inrs cité plus haut, une phrase retient notre attention et viendrait casser le sophisme précédemment présenté : « La rémanence des symptômes a été notée, alors que la source est supprimée, les sensations de malaise peuvent perdurer quelque temps ». Autrement dit, les effets des infrasons peuvent durer dans le temps et ne disparaissent pas caricaturalement dès qu’on sortirait d’une soi-disant zone polluée. De plus, selon l’Académie nationale de médecine, ces fameux symptômes « ne semblent guère spécifiques et peuvent s’inscrire dans ce qu’il est convenu d’appeler les Intolérances Environnementales Idiopathiques [IEE] ». Ces dernières définissent en fait les « symptômes récidivants non spécifiques attribués à une faible exposition à différentes substances fréquentes dans l’environnement » et sont souvent liées à l’hypersensibilité aux champs électromagnétiques. Rien de spécifique aux éoliennes donc.

Pourtant, Nina Pierpont se permet de tourner en dérision ceux qui se moquent de son syndrome éolien, parce qu’ils ne sont ni scientifiques et qu’ils n’habitent pas « dans l’ombre d’éoliennes ». Selon sa logique donc, seuls les spécialistes auraient leur mot à dire ; ces mêmes spécialistes qui renient en masse son travail – quoiqu’en disent les commentaires positifs au début de son ouvrage.

Le 8 juillet 2021, le tribunal de Toulouse a même reconnu ce syndrome éolien, donnant raison aux plaignants qui se disaient en proie à des nausées, saignements de nez, et même à des pertes de connaissance. Cette décision provoqua un tollé, mais fut considérée comme une réelle victoire chez les anti-éoliens qui espèrent qu’elle fera jurisprudence.

Des études plus sérieuses

En réalité, la majorité des études un tant soit peu scientifiques sur le sujet conclut que les éoliennes sont inoffensives de par la faible puissance de leurs infrasons. La gêne proviendrait davantage de points de vues conscients ou inconscients, comme semblent le prouver de nombreuses études.

« Aucune association claire ou cohérente n’est établie entre les sons émis par les éoliennes et toute maladie ou tout autre indicateur d’effet néfaste sur la santé humaine »

Massachusetts Institute of Tecnology (MIT), 2014.

D’après deux études françaises récentes (2017) respectivement dirigées par l’Anses et l’Académie nationale de médecine, la question pâtit tout d’abord d’un manque de connaissance scientifique quant aux effets des infrasons éoliens, ce qui laisse le champ libre à divers élucubrateurs. Dans son rapport, l’Anses remarque en effet que « les sources secondaires [articles de presse, chroniques radio, livre, etc.] sont nombreuses alors que le nombre de sources primaires [étude scientifique, enquête, etc.] qu’elles sont censées synthétiser est limité. » Et d’expliquer que « cette particularité, ajoutée à la divergence très marquée des conclusions de ces revues, montre clairement l’existence d’une forte controverse publique sur cette thématique ». Les éoliennes inquiètent beaucoup alors que le sujet ne fait pas vraiment débat au sein de la communauté scientifique.

« [Les « symptômes éoliens »] correspondent cependant à un ensemble de manifestations pouvant être consécutives à un stress, à la perte de sommeil, qui peuvent devenir handicapantes pour le sujet qui les ressent. »

Rapport de l’Anses, 2017

Dans une étude allemande joliment dénommée Machbarkeitsstudie zur Wirkung von Infraschall (2014), l’Agence fédérale de l’environnement explique qu’« à ce jour, il n’existe pas de connaissances scientifiquement établies prouvant un impact négatif des infrasons en dessous du seuil de perception [100 dB(G)], même si de nombreux articles de recherche postulent des hypothèses en ce sens ». Ainsi, la pseudo nocivité des éoliennes tiendrait… en des hypothèses. Rien de prouvé donc.

Un effet nocebo

Les deux études françaises constatent également un effet nocebo : les habitants créent inconsciemment leurs symptômes à cause d’informations qu’ils pensent vraies. « En d’autres termes, la crainte de la nuisance sonore serait plus pathogène que la nuisance elle-même », conclut l’Académie nationale de médecine (page 11 du rapport de 2017 précédemment cité). Une étude australienne à grande échelle de 2013 explique par exemple qu’un individu vivant à moins de 5 km d’un parc éolien sur 250 s’est déjà plaint des éoliennes. Parmi ce faible pourcentage, 72% mettent en cause un parc éolien directement visé par des groupes anti éoliens. La plainte serait donc le fruit non pas de l’éolienne, mais du discours autour de cette dernière. De plus, une étude néozélandaise menée en double aveugle conclut très clairement que plus un individu s’attend à être impacté de manière négative par les infrasons, plus il le sera, alors même lorsque ces mêmes infrasons n’entrainent aucune gêne chez celui étant non conscient de la pseudo dangerosité des infrasons éoliens. Une autre étude menée par la même chercheuse, Fiona Crichton, psychologue de la santé à l’université d’Auckland, conclut que les symptômes dits « éoliens » peuvent être atténués voire supprimés une fois que l’individu atteint est au fait de l’effet nocebo ainsi que de la non-nocivité des éoliennes.

La France abrite également RIBEolH, un projet d’étude qui a récemment débuté et qui a pour but d’évaluer « les effets sur la santé du bruit audible, en particulier des sons basse fréquence (SBF), et des infrasons, émis par les éoliennes ».

La santé est multiforme

Fiou, vous voilà maintenant abreuvés d’études scientifiques. Et leur constat est quasiment unanime. Néanmoins, ces dernières n’ont d’yeux que pour les infrasons : aucune ne parle de gêne plus indirecte. Aucune ne mesure précisément la peine éprouvée par les riverains des éoliennes, une peine qui n’est pas forcément visible, pas nécessairement physique. On oublie trop vite que la santé est multiforme :

« La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. »

Définition de la santé de l’OMS.

Le bruit, les infrasons et l’effet stroboscopique ne sont pas les seules conséquences des éoliennes. Certes elles sont les conséquences les plus directes, mais il en existe de bien plus indirectes et sournoises. On peut penser, par exemple, à la dévalorisation du bien du fait de la proximité du domicile avec un parc éolien. Ou bien même du fait que l’éolienne nuise au paysage. Pour un riverain, il est clair qu’une perte d’argent accompagné par un paysage moins beau, ça ne peut pas être positif. Encore faut-il prouver cette pseudo baisse – alors qu’on parle plutôt d’impact « quasi nul » – et expliquer en quoi une éolienne rend la vue si moche, ce qui est un critère totalement subjectif…

Jusqu’au complotisme

Au bout d’un certain moment, la méfiance vis-à-vis des scientifiques et de leurs conclusions devient fatiguant, et cela peut même aller jusqu’à du complotisme. Il fallait bien mettre un mot là dessus. C’est sûr que l’organisation d’un complot expliquera bien des phénomènes inexpliqués : si la science dit que les éoliennes ne sont pas si nocives que ça, ce serait parce qu’ils mentent ou plutôt qu’« on » les fait mentir. D’accord, si on veut, mais le débat sort alors des sentiers battus : comment débattre sans d’autre preuves que les conclusions d’un pseudo scientifique dont la méthodologie est totalement foireuse ? Et bien on ne peut pas. La seule solution est de tester scientifiquement nos hypothèses. Si elles ressortent du bain méthodologique, alors tant mieux, sinon eh bien tant pis. Les résultats des études que je vous ai présentées ont tous résisté à la méthode scientifique. Et les enseignement de ces dernières indiquent entre autres une proéminence des discours sur les faits concernant le danger éolien.

Bien loin de moi toutefois l’idée de dire que, puisque dire du mal des éoliennes nous tourmente, il faut se bâillonner et prendre la pilule bleue. Au contraire, cet article a pour dessein de traiter la question sanitaire avec sérieux et honnêteté. C’est cette réflexion qui me mène à penser qu’en fin de compte, la vraie nocivité des éoliennes se terre dans un débat public houleux et non-scientifique plutôt que dans ses infrasons ou ses ombres. La plus grande menace que notre santé subirait serait-elle du fait des contestataires qui s’arment de concepts fallacieux ?

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Allemagne : l’exemple d’une transition énergétique ratée ?

Vendredi 13 janvier, TotalEnergies annonçait la mise en place de son terminal d’import de gaz naturel liquéfié (GNL, aussi appelé gaz de schiste). La guerre en Ukraine a indéniablement levé le voile sur la dépendance européenne envers la Russie en matière d’énergie. Le recours au GNL, anciennement boudé par nos voisins outre-Rhin, en est une conséquence directe. Ce revirement est également très politique. En effet, il s’inscrit parfaitement dans la levée de boucliers occidentaux – et notamment européens – contre l’invasion russe.

Après avoir suspendu la mise en fonction de Nord Stream 2 (gazoduc reliant la Russie et l'Allemagne, carte ci-contre), les Allemands ont décidé d'investir 1,5 Md dans...le Gaz naturel liquéfié, et, qui plus est...du Qatar.

La guerre en Ukraine a bon dos

Mais en réalité, tout cela dépasse la guerre en Ukraine. La dépendance à la Russie n’est qu’une conséquence des politiques menées depuis 20 ans en Allemagne. Des politiques ayant pour fer de lance la transition énergétique amorcée sous Angela Merkel (2005-2021) dans l’optique de se diriger vers un mix électrique dompté par les énergies renouvelables (EnR). Pourtant, malgré une Allemagne devenue le modèle européen de l’électricité verte – 4O% (données 2021) de son électricité provient d’énergies renouvelables -, le pays affiche aujourd’hui l’une des plus haute empreinte carbone par habitant d’Europe (8,70 tonnes par habitant en 2017, 5ème plus importante d’Europe) et le prix de l’électricité le plus élevé (31 c/kWh).

Mais alors, à quoi ont servi les efforts de l’Allemagne ? Tout s’est-il passé comme prévu, ou est-ce un échec complet ? D’abord, observons l’évolution du mix électrique allemand pendant l’ère Merkel :

La part du renouvelable est passée de 11% en 2005 à 50% en 2020. Fabuleux, non ? Infographie Le Monde.

Halte là, il ne faut pas oublier de distinguer le mix énergétique du mix électrique. En outre, l’électricité n’est qu’une source de production d’énergie. D’autres, souvent fossiles, produisent directement de l’énergie, sans passer par la « case électricité » (exemples : essence, chauffage au gaz). Ainsi, en Allemagne, l’électricité compose environ 21% du mix énergétique, contre 36% pour le pétrole, 26% pour le gaz et 8% pour le renouvelable et les biocarburants (Le Monde, 2021). Ainsi, selon l’Agence Internationale de l’Énergie (IEA) la part des énergies bas carbone dans le mix énergétique allemand s’élève à environ 20%, dont 2% de nucléaire (voir graphique ci-dessous) . C’est moins que la France, dont le mix énergétique est composé à environ 50% d’énergies bas carbone dont 40% de nucléaire.

« L’Allemagne s’est concentrée sur l’électricité en négligeant les transports, première source d’émission de CO2. »

Cécile Maisonneuve, ancienne directrice du centre énergie de l’Institut français des Relations Internationales (IFRI). Le Monde, 2019.

L’énergie allemande reste donc majoritairement fossile. Est-ce un aveu d’échec ? Car l’objectif de toute transition énergétique est justement de mettre en place des énergies décarbonées et donc de diminuer l’importance des plus émettrices en GES. Or l’Allemagne n’a diminué la part de ces énergies que de 7 points de pourcentage environ, le nucléaire se faisant remplacer par des EnR, ne changeant quasiment pas les émissions globales de GES.

Répartition des types de productions d'énergies en Allemagne (1990-2020). Source : IEA.

Le mix électrique n’est rien de plus que le haut de l’iceberg du mix énergétique. Il est bien plus attrayant de voir que 55% d’énergies renouvelables alimentent l’électricité allemande que la dure réalité qui est celle d’un mix énergétique dominé à près de 80% par de polluantes énergies fossiles. Angela Merkel semblait l’avoir bien compris. Quelques jours après l’accident nucléaire de Fukushima de 2011, Mutti choisit de sortir progressivement de l’énergie nucléaire, acclamée par une partie du peuple allemand. Hourra ! L’Allemagne allait sortir du nucléaire afin de construire des milliers d’éoliennes et de panneaux solaires ! Oui mais voilà, ces derniers n’ont remplacé que la moitié du nucléaire allemand, qui représente encore 11% de la production électrique allemande. De plus, ces types de production renouvelable sont intermittents, et il est alors nécessaire de mettre en place des énergies pilotables, qui sont en grande partie fossiles – puisque le nucléaire n’est plus une possibilité.

Délaissement du nucléaire

Celle qu’on surnommait la chancelière du climat (Klima Kanzlerin) aurait peut-être dû compter sur l’énergie nucléaire comme un moyen de transition entre le fossile et le renouvelable, mais, hâtée par les écologistes allemands, son devoir d’incarner une figure protectrice et les élections qui approchaient, elle engagea un processus qu’on sait aujourd’hui dans une certaine mesure inefficace. Certes, la question se jouait à l’époque sur la sûreté nucléaire, et on lui aurait reproché de ne pas avoir fermé le parc nucléaire si un accident s’était produit, mais le nucléaire civil était (et est toujours) si stratégique – voire prometteur – que l’ex chancelière ne peut que remettre en question les politiques qu’elle a engagées. D’ailleurs, en 1995, alors ministre de l’environnement, Angela Merkel avait prophétiquement déclaré ceci : « sans l’énergie nucléaire, nous ne pourrons pas atteindre nos objectifs en matière de réchauffement climatique ».

D’autant plus que la perte du nucléaire a rimé avec une forte dépendance, notamment envers la Russie. En outre, avant la crise énergétique actuelle, 34% du pétrole, 65% du gaz et 23% du charbon en provenait (Le Grand Continent, 2022).

« 10 ans de cette vie ont suffi à la changer en junkie. »

Telle une junkie donc, l’Allemagne doit combler ses besoins. Les relations qu’elle entretenait avec son dealeur – la Russie – étaient en train de se renforcer. Mais la Russie a voulu jouer sur un autre terrain propice à tout trafiquant, celui de la guerre de territoire. Par relation d’alliance (et non par souci démocratique au vu de son nouveau fournisseur), l’Allemagne se doit de changer de produit et de fournisseur. Quoi de plus naturel de se tourner alors vers le GNL et de se rediriger vers le Qatar !

« Manifestement la « transition » n’a pas les vertus décarbonantes que l’on peut voir mises en avant dans diverses publications institutionnelles – voire universitaires – allemandes… »

Jean-Marc Jancovici, ingénieur et fondateur de The Shift Project. (site personnel, 2013)

Une transition en double teinte

Une transition énergétique a pour but de tendre vers un modèle pérenne d’approvisionnement en énergie, autant indépendant et décarboné qu’économiquement convenable. En ce sens, l’on ne peut pas dire que l’Allemagne ait réussi sa transition. Néanmoins, ses efforts n’ont pas été vains. En effet, l’Allemagne a appris à manier la technologie du renouvelable, ce qui va inéluctablement aider le reste de l’Europe pour le développement de ces technologies. De plus, les puissances industrielles et les pouvoirs publics se concertent afin de trouver une solution commune. Ainsi, le BDI, la fédération de l’industrie allemande, a jugé possible l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050, à condition d’y mettre le prix : 2 300 milliards d’euros. (Le Monde, 2022)

« Entre 2010 et 2020, nous avons réduit les émissions de 15 millions de tonnes par an en moyenne. D’ici à 2030, nous devons les réduire de plus de 40 millions chaque année. »

Robert Habeck, ministre de l’Économie et du Climat lors de la présentation ambitieuse de son plan climat, le 11/01/2022

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Guerre Russie-Ukraine : comment le mix énergétique européen est remis en question

C’est le sujet qui fait sien les unes de tous les journaux : la Russie est en train d’envahir l’Ukraine. Relevant d’un contexte historique et culturel complexe et non pas de nos domaines de prédilection, nous ne nous intéresserons pas ici à la légitimité ou non de l’une ou l’autre des parties.

Suite à l’annonce de l’offensive militaire russe, le soutien de l’Union Européenne à l’encontre de l’Ukraine fut général et inconditionnel. L’UE ne s’arrêta pas là et commença alors à attaquer la Russie par des sanctions économiques. Cependant, la Russie n’est pas dépourvue de défense. Comme l’expliquait le politologue Bertrand Badie à l’Obs le 23 février, « avec la mondialisation, les sanctions économiques pèsent presque autant sur celui qui les impose ». En effet, les sanctions à l’encontre de la Russie pourraient s’apparenter à une grève de la faim qui n’aura peut-être pas les effets escomptés…

La dépendance européenne

En outre, les pressions économiques, et notamment sur le secteur énergétique, pourraient très bien se retourner contre l’Europe au vu de la très forte dépendance de cette dernière envers le gaz naturel russe. En 2020, la Russie fournissait plus de 40% du total des importations de gaz naturel de l’UE. Ce chiffre s’élève à 66% pour notre voisin allemand. Pourtant, c’est bien ce dernier qui, mercredi 23 février, a suspendu la procédure de certification de Nord Stream 2, le tout nouveau gazoduc devant conduire le gaz naturel russe vers l’Allemagne, très dépendante de par son abandon du nucléaire (ils ne lisent donc pas Ecolucide…) et sa moindre utilisation du charbon, jugé trop polluant par les verts allemands. (Maj : l’Allemagne déjà annoncé avoir débloqué un fond exceptionnel de 1,5 milliard d’euros qui devra servir à l’assurer en énergie par le biais provisoire de gaz naturel liquéfié (GNL). Reste à savoir avec qui elle commercera)

Néanmoins, d’autres pays sont encore plus énergétiquement dépendants du gaz russe :

Toujours est-il que, si la Russie et l’UE n’ont pas encore clairement instauré de mesures, on assiste en Europe depuis une semaine, à une augmentation de 50% du prix du gaz.

Prenons l’exemple de la France. L’on observe qu’elle a relativement su se passer d’importations russes (17% des importations) afin de se concentrer davantage chez les norvégiens (environ 36%). Selon le commissariat général au développement durable, le gaz servirait en grande partie au chauffage (60% en 2011). Et si le chauffage au gaz est la prochaine cible à abattre, il reste 21% des maisons neuves et 75% des logements collectifs neufs qui en sont équipés. Ainsi, une partie non négligeable des Français pourrait être impactée par la crise énergétique qui se dessine en Europe, même si Bruno Le Maire soutient que le bouclier tarifaire sur le gaz sera maintenu.

La Russie et son robinet

Cependant, il ne faut pas oublier que la France est un des pays les moins dépendants. Si l’on regarde la Macédoine du nord ou les pays Baltes (Lettonie, Lituanie et Estonie : respectivement à 100%, 93% et 93% de gaz russe parmi leurs exportations totales selon Eurostat pour l’année 2020), cela fait froid dans le dos. Et le froid, les habitants le sentiront si la Russie décide de couper le robinet.

D’où cette question qui nous taraude : l’Europe peut-elle subvenir à ses besoins de gaz sans l’une des plus grandes réserves du monde ?

La Russie est évidemment le fournisseur incontournable de l’Europe, mais elle n’est pas seule à y exporter son gaz. La Norvège (18% des importations) et l’Algérie (10%), respectivement 2ème et 3ème exportateurs, sont aussi présents. Mais pourraient-ils compenser la perte de gaz russe ? En octobre 2021, le Norvège avait déjà augmenté ses exportations de 2% vers l’UE. En Algérie, le cas est différent. Son potentiel est énorme, d’autant plus qu’on y trouve également en grande partie du gaz de schiste, ce qui la classe troisième en matière de volume des ressources en gaz de schiste à l’échelle mondiale. L’Algérie l’a bien compris et alors signé des accords avec des entreprises telles que TotalEnergies (à l’époque, simplement Total) et Exxon Mobil. Néanmoins, le gaz de schiste est très polluant, et en Algérie, son exploitation n’a jamais débuté du fait de fortes protestations populaires de 2015 à 2019, date à laquelle le projet semble avoir été définitivement enterré.

Ces ressources auraient pu constituer une bonne alternative face au gaz russe alors que des engagements avec l’Espagne et le Portugal bloqueraient les capacités de production du gaz naturel. A un tel point que le ministre qatari de l’Energie qualifiait de « quasiment impossible » le fait de « remplacer rapidement » les exportations russes lors du Forum des pays exportateurs du gaz de 2014. On peut néanmoins supposer que, au vu de la situation exceptionnelle, les contrats pourraient être renégociés, et des fonds, débloqués, pour augmenter la production algérienne. D’ailleurs, si l’Algérie ne produit pas de gaz de schiste, les Etats-Unis, l’Australie et le Qatar – qui a assuré ne pas être la solution – en sont d’importants, et pourraient alors boucher le vide que laisserait la Russie, ce qui serait une perte de marché importante.

Une dépendance mutuelle

Patrick Martin-Genier, spécialiste des questions européennes, expliquait mercredi 23 février sur France Info que la Russie n’a, en effet, pas intérêt à ne plus fournir l’Europe puisqu’elle dépend de sa rente énergétique (ses exportations de gaz représentent 15% de son PIB). En effet, comme l’expliquait en 2007 un rapport d’information du Sénat sur les relations UE/Russie : « la dépendance en matière énergétique est mutuelle, l’UE représentant le principal débouché des exportations d’hydrocarbures de la Russie. » La Russie peut toujours se tourner vers la Chine mais cette dernière, en position de force, serait en mesure de revoir les prix avec la Russie à la baisse… En réalité, et pour appuyer ce qui est dit plus haut, le fait que nous vivions ce système d’échanges où tous les États sont interdépendants implique un contrat avec ce dernier stipulant une sorte de respect de la dépendance. Si nous ne la respectons plus et la perturbons – ce qui se passe aujourd’hui par l’envoi de sanctions -, alors le système se retourne contre nous et nous punit tous, l’UE en lui coupant le gaz russe, et la Russie en lui privant d’une part de marché considérable. Mais la Chine, étant placé à l’extérieur de ce contrat, peut profiter de ce capotage pour en créer un nouveau, plus avantageux, mais toujours d’interdépendance.

Ainsi, toute sanction économique devrait être soigneusement réfléchie et concertée avec les autres clients européens de la Russie – ceux faisant partie de ce fa(fu?)meux contrat – du fait que tous n’apprécieraient pas cette possible crise énergétique et toutes les perturbations économiques et sociales qui en découleraient de la même façon.

Qu’en tirer ?

Nul ne sait encore précisément ce qui découlera de cette crise géopolitique, mais la simple évocation de l’épée de Damoclès suspendue en ce moment sur les importations de gaz russe met à jour la sur-dépendance européenne concernant l’énergie, notamment d’énergie fossile (Dans l’Union européenne, plus de 70 % de l’énergie disponible est d’origine fossile : pétrole (36 %), gaz (22 %) et charbon (11 %). Ce malheureux dessein nous fait alors réfléchir à ce qui cloche dans ce contrat de dépendance, pourtant si communément admis.

D’abord, le secteur de l’énergie est bien trop important, vital, qu’aucun pays ne devrait dépendre à ce point d’autres États, qui plus sont, totalement instables. Ensuite, il nous faut nous interroger sur la nécessité du gaz : pourquoi en raffolons nous ? Les réponses divergent selon les pays (nous l’avons vu avec le cas allemand), mais ce que l’on sait, c’est que le gaz n’est pas la meilleure des solutions, étant polluant.

Se dressent alors des solutions :

Nous devons alors changer notre consommation énergétique et ainsi se rapprocher d’une indépendance énergétique ou, à défaut, d’une dépendance fiable et maitrisée. Parce qu’aujourd’hui, en Europe, choisir le gaz, c’est faire le choix de la perte de son indépendance couplée à une pollution conséquente – certes moins que le charbon ou le pétrole. Le cas de l’Allemagne est particulier car sa dépendance relève du choix de son mix énergétique, supposément écologique. D’autres solutions sont possibles et la France devrait être fière et montrer les avantages d’avoir gardé ses centrales nucléaires.

Néanmoins, être énergétiquement indépendant n’est pas assez : nous devons également décarboner notre consommation d’énergie et minimiser nos pertes, à commencer par le chauffage (notamment en France). En outre, ce dernier doit être économiquement et écologiquement optimisé en améliorant l’isolation thermique des infrastructures et investissant dans des solutions plus performantes telles que la pompe à chaleur et le chauffe-eau solaire. En ce point, la Finlande est novatrice, car, si ses exportations de gaz dépendent presque uniquement de la Russie (98%), elle possède, selon la Société française d’énergie nucléaire (Sfen), le plus grand nombre de pompes à chaleur par habitant au sein de l’Union européenne, soit 700 000 pour 5 500 000 habitants et est par ailleurs en lice pour devenir une grande nation nucléaire (d’où l’intérêt que lui porte la Sfen)