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Hugo Clément : l’écolo qui s’impose

En l’espace d’une soirée, le militant écologiste Hugo Clément est passé de la gauche à l’extrême droite parce qu’il a osé débattre avec un cadre du Rassemblement National à propos de la crise environnementale.

Courageusement, le journaliste a accepté de débattre face à Jordan Bardella, président du RN, à propos de l’écologie dans le cadre du grand débat des valeurs organisé par Valeurs Actuelles jeudi 14 avril. Si le débat n’a pas franchement été de haut vol, il a tout de même permis à Hugo Clément de présenter une situation environnementale critique tout en insistant sur le caractère universel de l’écologie : eh oui, les Français aussi doivent changer leurs pratiques quoiqu’en dise leur mix électrique peu émetteur.

Sa simple présence a provoqué deux réactions. A droite et à l’extrême droite, on a consacré son audace tout en ajoutant que l’écologie ne doit pas être la chasse gardée de la gauche. Un refrain qu’on entend depuis un moment sans qu’il daigne changer le discours politique du RN par exemple, qui reste peu convaincant au vu des enjeux actuels.

A gauche (et encore plus à l’extrême gauche), certains ont été scandalisés par la soi-disant complaisance du journaliste, qui s’est alors doté des étiquettes relatives à l’extrême droite. Selon ces derniers, on ne devrait pas débattre avec le RN et encore moins dans l’antre de la droite radicale qu’est Valeurs Actuelles.

Hugo Clément, qui s’était fait très discret sur la promotion de sa venue, a vivement réagi sur les réseaux sociaux, afin de désamorcer la polémique qui n’a d’ailleurs eu qu’un relatif écho. Son explication est plutôt simple : l’écologie est un sujet universel et touche tout le monde – a fortiori les classes populaires qui sont d’ailleurs très présentes dans l’électorat du RN -, le discours écologiste doit être porté partout. Et ce n’est pas tabou de dire que la droite et l’extrême droite ont négligé ce domaine. « Estimer qu’il ne faut pas parler d’écologie en dehors du cercle des convaincus, et que ceux qui essayent de le faire sont des « fachos », c’est une vision très sectaire », explique-t-il à La Dépêche.

Dès lors, comment ne pas trouver qu’Hugo Clément a aidé la cause en performant hors de ses cercles habituels (France 5, Instagram, France Inter) ? Toutefois on ne peut pas nier que le journaliste a été utilisé par Valeurs Actuelles afin que Jordan Bardella puisse parler d’écologie. Sa présence a d’elle-même propulsé le président du RN sur le terrain du débat écologiste sur lequel il ne s’était jamais vraiment risqué auparavant et lui a donné une saveur attractive : une figure majeure de l’écologisme contre le président du RN, ce qui n’a pas manqué de faire grimper l’audience. C’est cela qui est reproché à Hugo Clément par plusieurs autres militants dont Aurélien Taché (député EELV). Ajoutez à cela une bonne dose de sophismes en tout genre, et voilà la polémique du moment…

Face à cette dernière, il faut savoir raison garder : le RN n’a toujours pas fait ses preuves en matière d’écologie. Ce n’est pas seulement nous qui le disons mais le Shift, l’association de Jean Marc Jancovici, quand ils ont analysé le programme du RN pour la présidentielle 2022. « Débattre d’écologie avec le RN, dans des événements et des médias où l’audience est acquise à ce parti, est une nécessité. D’abord pour sensibiliser cet électorat à l’importance du combat pour le climat et la biodiversité, mais aussi pour expliquer que le RN ne propose quasiment rien sur cet enjeu vital pour l’avenir de l’humanité », explique d’ailleurs Hugo Clément.

Enfin, il y a ceux qui expliquent qu’il ne faut pas débattre avec l’extrême droite parce que, en gros, c’est le mal, et que personne ne veut donner de l’audience ni accepter le mal. C’est un point de vue qui se défend – d’autant plus qu’il est transposable à tout un tas d’autres positions politiques et d’idéologies -, mais dans le cas d’Hugo Clément, c’est un peu différent. En outre, le militant a déroulé son argumentaire à un événement organisé par la droite radicale, et c’est globalement cette dernière qui va visionner la rediffusion du débat. Dès lors, quel discours devient acceptable et pour qui ? Bingo, le discours écolo d’Hugo Clément chez des Français de droite – électeurs du RN ou non d’ailleurs.

Le cas aurait été tout différent si – au hasard – un député EELV avait débattu 1h face à Eric Zemmour sur une chaine populaire de la TNT et à une heure de grande écoute…

En tant que média qui s’est en partie créé afin de briser le monopole d’EELV sur les questions environnementales, nous donnons tout naturellement notre soutien à Hugo Clément. Même si nous ne sommes pas totalement d’accord avec ses positions, nous restons certains qu’il faut informer intelligemment le plus de personnes possible sur la question environnementale. Et c’est une tâche qui est loin d’être simple ! L’écologie doit s’adresser à tous, et pour cela, il faut connaitre le constat. Ensuite, nous pourrons débattre de quel moyen nous préférons pour parvenir à un monde qui ne mette plus la nature en danger, qui ne nous mette plus en danger.

planète terre électrique

Pourquoi il est nécessaire de diversifier le mix électrique

Dans le grand débat du mix énergétique, on entend souvent la même prérogative : il faudrait diversifier le mix électrique. Cela fait même partie des « deux grands leviers » du gouvernement, avec celui de baisser sa consommation. Mais pourquoi diversifier exactement ? La diversification de nos moyens de production d’énergie n’aide pas en soi à une diminution de nos émissions de gaz à effets de serre. Diversifier pour diversifier, ça ne sert à rien.

Le ministère de la transition écologique explique très simplement l’enjeu : « la diversification du mix électrique est essentielle, car elle vise à rendre le système électrique français plus résilient face à de possibles aléas. » Une explication synthétique et efficace, mais que l’on voit bien trop peu dans le débat public. On préfère fustiger les éoliennes ou crier haro sur l’atome. Pourtant, en diversifiant, on évite tout black-out et on maitrise finalement mieux notre consommation électrique.

Le mix électrique de la France métropolitaine est dominé par le nucléaire. Connaissances des énergies, d’après RTE.

Chaque moyen de production d’énergie a des inconvénients relatifs à une diversité d’aléas. Tout l’enjeu est donc de minimiser voire de supprimer les conséquences de ces aléas. Diversifier le mix électrique est une solution.

Les centrales à gaz, au pétrole et au charbon sont de toute évidence les premiers moyens de production électrique à écarter. Afin de réduire notre vulnérabilité, on pourrait très bien chercher un fournisseur fiable, mais au vu de l’instabilité géopolitique des fournisseurs mondiaux – on l’a très bien vu avec la guerre en Ukraine – et surtout au regard de leur bilan carbone, il n’y a pas de raison de continuer à utiliser ces sources d’électricité. En France, seul 10% de notre production électrique est concernée par ces moyens à haute émission de GES, un chiffre qui stagne tout de même depuis plus de 30 ans et qui ne dit pas grand-chose de notre consommation énergétique.

Concernant les centrales nucléaires à fission, on observe des problèmes – non négligeables mais souvent négligés – résultant d’approvisionnement en uranium (saviez-vous par exemple, que la France importe une grosse partie de son uranium à la Russie ?), mais aussi de fuites et de refroidissement à l’aide de sources d’eau qui tendent à monter en température et à diminuer. Le risque est de paralyser le parc nucléaire avec des maintenances à répétition et donc des pertes d’énergie de plus en plus importantes. Néanmoins, les conséquences sont plutôt bien connues et les solutions aussi, à savoir construire les centrales davantage près de la mer en circuit ouvert ou bien près d’une importante source d’eau et avec des tours aéroréfrigérantes. De plus, il faudra veiller à ce que les centrales ne soient pas installées dans des zones inondables – là aussi, ce n’est pas insolvable.

Energies renouvelables

Du côté des énergies renouvelables, on retrouve les fameux panneaux photovoltaïques ainsi que les éoliennes. Le problème est connu puisqu’il s’agit encore une fois de leur intermittence : quand le vent ne souffle plus et que les nuages couvrent le ciel, la production d’électricité est à son plus bas. Si on se penche sur les barrages hydroélectriques, on aperçoit également que le réchauffement climatique risque de fortement impacter le niveau des bassins en amont qui actionnent les turbines (et irriguent plusieurs champs – le problème n’est ici pas exclusivement électrique). En vérité certaines conséquences sont déjà visibles. Par exemple, au Brésil, plusieurs barrages récents font face à un manque de pluie, ce qui a pour conséquence de baisser considérablement la production électrique.

Diversifier le mix électrique conduit donc à minimiser les risques d’une impossibilité de production : le vent ne tourne pas ? Pas grave, on a du nucléaire (variante allemande : « Pas grave, on a du charbon »). D’un autre côté, un niveau conséquent d’éoliennes terrestres et de panneaux solaire peut laisser le champ libre aux maintenances des sites nucléaires par exemple. L’important est de diversifier intelligemment avec des moyens de production complémentaires tout en ayant en tête que le changement climatique va altérer notre production électrique. Une production qui tend malheureusement à augmenter dans le mix énergétique (voitures électriques, chauffage par pompe à chaleur, etc.) dans une logique d’émancipation vis-à-vis des énergies fossiles polluantes. Mais attention, il n’y a pas de mix magique. Tous les pays ne sont pas capables de se doter en nucléaire ni en barrages hydroélectriques par exemple.

Le nucléaire indispensable ?

Dans sa synthèse des Futurs énergétiques 2050, RTE a imaginé six scénarios de mix électrique, allant du 100% renouvelable au mi-nucléaire mi-renouvelable. Si vous avez bien compris les enjeux, vous devriez vous demander comment un mix sans nucléaire et sans centrale thermique polluante est réaliste. Toujours selon RTE, la solution principale reposerait sur les centrales thermiques utilisant des stocks de gaz décarbonés et sur les stations de transfert d’énergie par pompage (STEP). Ce sont elles qui vont pouvoir sécuriser le système électrique à grande échelle, par exemple dans les cas où le soleil est caché et le vent souffle peu. De manière quotidienne, des batteries seront également mises en place. Les panneaux solaires les rechargeraient la journée, et on dépenserait l’énergie accumulée du soir au matin. Au-delà de ces solutions techniques de back-up et de batterie, RTE prévoit d’accroitre la flexibilité. Il faudra gérer intelligemment notre consommation d’électricité en fonction de la production : recharger sa voiture le jour, chauffer le soir, etc. Enfin, dans les scénarios les plus renouvelables, l’interconnexion (et donc l’interdépendance) entre pays européens sera logiquement accrue afin de palier le mieux possible la demande électrique.

Ce qu’il faut retenir, c’est d’abord qu’il faut bannir tous les discours radicalement pour un seul type d’énergie. Ceux fustigeant les énergies renouvelables tout en prônant le nucléaire, eh bien ceux-là se prennent 7%. Blague à part, c’est une récurrence dans un certain discours énergétique de droite qu’il faudrait abandonner. Aussi, il ne faut pas oublier que le mix électrique n’est que l’arbre qui cache la forêt : c’est notre consommation d’énergie permanente qui doit être questionnée, pas seulement notre consommation électrique.

jongle avec la terre

Qatar : un Mondial neutre en carbone ?

Cette 22ème coupe du monde n’a pas encore commencé que les articles pleuvent déjà par dizaines, voire par centaines : d’aucuns accusent la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) et le Qatar d’organiser un mondial qualifié par certains d’une « aberration écologique”. Au milieu de ce déluge, personne ne nage sérieusement à contre-courant – ou alors il se ferait vite emporter au fond de l’eau. En cela, nous faisons face à un paradoxe : alors que tous pointent d’un doigt accusateur le mondial 2022, peu voire aucune conséquence ne semble se dégager. Comme si nous décochions nos flèches vers une même cible, la raison individuelle, sans qu’elle ne daigne convertir les convictions en actions (manifestation, boycott, …). Il faut dire que de l’autre côté – pour une partie non négligeable des Français en tout cas – la passion tire la corde avec acharnement. Une passion sous stéroïdes en Europe, a fortiori cette année en France dont l’équipe est détentrice du titre de champion du monde.

Qui sème la pluie récolte le déluge

Les raisons de cette colère sont désormais bien connues : un désastre humain et moral ainsi qu’un fourvoiement total des objectifs environnementaux. Cependant, quand on parle des dérives du mondial, c’est plus souvent pour dénoncer les conditions des ouvriers – sujet toutefois très important – ayant construit les stades que pour parler du désastre écologique, du moins dans sa totalité. Ainsi, nous nous concentrerons sur l’aspect environnemental de l’événement. Et croyez-moi, un article n’est pas de trop.

Sur le plan environnemental donc, la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) montre patte verte et assure que le mondial 2022 sera « neutre en carbone ». A première vue, cela fait un peu trop beau pour être vrai, mais il faut tout de même souligner que cette question n’est que très peu traitée dans les médias. Pourtant, si les dires des organisateurs sont vrais – et réalisables -, la polémique écologique n’aurait pas lieu d’être.

Dans une vidéo publiée en juin 2022, Gianni Infantino, président de la FIFA depuis 2016, appelle chacun à brandir le carton vert de la FIFA pour la planète.

Des chiffres remis en question

Selon les organisateurs, 3,63 Mégatonnes d’équivalent CO2 (MtCO2e) seront émis par la coupe du monde, dont la moitié (51%) par les transports. C’est autant que l’empreinte carbone de 440 000 Français (ministère de l’environnement, données 2020). En mesure concrète, l’on retrouve notamment la climatisation des stades (qui sont à ciel ouvert) ou bien la mise en place d’un couloir aérien entre le Qatar et d’autres pays étrangers. Selon L’Obs, un avion décollera toutes les 10 minutes.

Mais les 3,63 MtCO2e annoncés par la FIFA sont fortement remis en question, tout comme leur compensation à l’aide de crédits carbone. A l’origine de ces doutes, il y a une ONG belge. En mai 2022, Carbon Market Watch a publié un rapport mettant très fortement en doute les dires de la FIFA.

7 stades de plus dans le désert

En outre, les émissions concernant la construction des six stades permanents seraient 8 fois plus importantes. Le royaume n’accueillant que peu de matchs importants, il n’existait qu’un seul grand stade. Il a donc fallu en construire sept pour l’occasion : six permanents et un démontable.

Les émissions de GES comprennent donc logiquement les émissions liées à la construction des 6 stades permanents. Cependant, elles sont rapportées au temps d’utilisation, soit 70 jours. Ainsi, alors que la construction du stade démontable a été évaluée à 438 kt d’équivalent CO2, la construction d’un stade permanent (sans les sièges démontables) a été évaluée à 4,5 kt CO2e… Dans leur logique, les stades seront utilisés après la coupe du monde, contrairement au stade démontable (le dénommé « stade 974 » ou « Ras Abu Aboud ») ou aux sièges démontables dont la mise en place et leur désinstallation est directement et incontestablement imputable à l’évènement du mondial.

Vers des stades fantômes ?

Mais le futur de ces stades semble loin d’être radieux. En outre, quand le mondial sera terminé, l’utilité de ces stades sera remise en question. J’en veux comme preuve ce qu’il se passe déjà dans certains stades russes (cdm 2018), brésiliens (cdm 2014) ou sud-africains (cdm 2010) qui sont en difficulté financière au vu de l’absence d’activité, contrairement aux stades allemands (cdm 2006). Par exemple, un stade de 40 000 places (qui sera ensuite transformé en un stade 20 000 places) sera réhabilité comme stade d’une équipe locale auquel le stade actuel a une capacité inférieure de presque deux fois.

Ainsi, la réhabilitation des stades à posteriori de la coupe du monde est secondaire. Ce n’est qu’une conséquence du mondial et qui plus est fort instable. Néanmoins, l’on ne peut pas exclure le fait que les stades se rempliront grâce à un possible intérêt généré par cet évènement international de taille qui n’a encore jamais eu lieu dans un pays arabe. Une sorte d’« effet coupe du monde », mais, dans une certaine mesure, à retardement : D’abord, le Qatar pourrait bénéficier de l’exposition médiatique gigantesque de la coupe du monde pour attirer le public qatari et des alentours afin de renflouer les nouveaux stades. De même, des jeunes espoirs pourraient voir dans le Qatar un lieu plein de potentiel pour leur carrière professionnelle. Ensuite, les jeunes qataris, et même les jeunes arabes, pourraient bien se décider à obtenir une licence de football et agrandir de ce fait les ligues nationales.

Toujours est-il que selon Carbon Market Watch, la construction des 6 stades permanents génèrerait au total (et au minimum, car l’ONG se réfère aux stades les moins grands et donc les moins émetteurs car elle n’a pas les données pour chaque stade) 1,62 MtCO2e, soit 8 fois plus qu’annoncé.

Des crédits carbone potentiellement caduques

Cependant, même si la FIFA avait correctement évalué les émissions de GES, la compensation environnementale qui doit mener à un bilan carbone neutre serait tout de même mise en péril. En effet, les organisateurs prévoient de compenser leurs émissions en achetant des crédits carbone (1 crédit carbone = 1 tonne de CO2). Le problème, c’est que les projets bénéfiques pour l’environnement qui génèrent ces crédits sont potentiellement « non additionnels ». Si c’est le cas, ces projets verraient le jour de toute manière et la vente de ces crédits ne sera donc qu’un plus, qu’une addition. D’ailleurs, les principaux standards de certification – Verified Carbon Standard (VCS) et Gold Standard (GS) – ont exclu les projets de ce type.

De plus, le principe même de la compensation environnementale via le marché du carbone a un côté pervers. Il aurait été plus utile de chercher un moyen d’émettre un minimum de GES plutôt que de chercher à les compenser très maladroitement. De plus, ce marché ne favorise pas la transition vers un modèle plus sobre mais reste, au contraire, dans le mythe de la croissance verte.

Un choix pour le moins questionnable

Le choix de ce pays est décidemment un amas d’inepties et de contre-sens. Il a fallu construire 7 stades, des routes, des hôtels de luxe et d’autres infrastructures pour accueillir le public dans un pays très chaud et dont – comme si ce n’était pas assez – le mix énergétique est composé à 99% de sources d’énergie haut carbone (gaz et pétrole en tête). Pour tout dire, le Qatar est même classé comme l’un des pays les plus pollueurs au monde en émissions de CO2 par habitant (32,5 tonnes/habitant en 2019, Banque Mondiale). Toujours sans oublier que la condition des ouvriers au Qatar est épouvantable et que les droits humains y sont chétifs.

L’on aurait aimé pouvoir croire à une adaptation extraordinaire de la part de la FIFA, mais que nenni. Il se produit ce que à quoi tout le monde s’attendait : absolument rien sinon que des chiffres et promesses en herbe tenus de nous laisser endormis. Une question plus large apparait alors : le football international est-il compatible avec l’écologie ? Peut-il même l’être ? A en voir les rires de Christophe Galtier et de Kylian Mbappé lundi 5 septembre lorsque l’on avait soumis la possibilité de déplacements plus sobres, la réponse semble être négative. Mais qui sait, le football retrouvera peut-être la raison.

chasseurs

Accidents de chasse : quelle réalité en France ?

Il suffit de taper « accident de chasse » pour se retrouver face à d’innombrables articles témoignant de ce que subissent promeneurs et riverains. Les chasseurs mèneraient même la vie dure aux « habitants des campagnes pendant la saison de chasse » selon Hugo Clément, activiste écolo le plus influent de France.

Mais est-ce bien la réalité ?

Victimes d’eux même

Les accidents de chasse ne devraient pas arriver. Mais, rappelons tout de même que la France accueille près d’un million de chasseurs et que la grande majorité des victimes (86% – rapport de l’OFB, 2021) sont des chasseurs eux-mêmes.

Ainsi, les chasseurs ne sont pas un gang qui ne ferait que de martyriser les pauvres paysans : les chasseurs sont les premiers à se tirer dessus.

De plus, les accidents de chasse sont globalement en baisse depuis 20 ans en France, et ce même rapporté à la baisse d’effectif des chasseurs.

Mais peut-être qu’indépendamment de leur quantité, les chasseurs ont baissé en qualité : moins bons, moins respectueux des règles de sécurité – pourtant de plus en plus nombreuses -, ou encore plus irrespectueux des riverains. Peut-être, mais peut-être pas.

Evolution du nombre de licenciés et du nombre d'accidents de chasse en France depuis 1999. Données ONB, FNC et Injep.

Terreur dans nos campagnes

Une chose est sûre : les accidents de chasse sont de plus en plus rares en France. Cela va dans le bon sens, sans que ce soit assez.

En somme, les accidents de chasse sont de plus en plus rares. En énumérer plusieurs s’étant passés la semaine dernière n’a rien d’une preuve qui indiquerait un climat de terreur dans nos campagnes, n’en déplaisent à un certain nombre d’anti chasse.

Paris Saint-Germain's French forward Kylian Mbappe leaves the bus upon his arrival before the French L1 football match between Paris-Saint Germain (PSG) and Olympique Lyonnais at The Parc des Princes Stadium in Paris on September 19, 2021. (Photo by FRANCK FIFE / AFP)

Oui, les grands clubs peuvent prendre le train

Alors que le Paris Saint-Germain s’apprête à disputer son premier match de Ligue des champions contre la Juventus de Turin ce soir à 21h, une polémique touche de plein fouet l’image du club.

Contexte

Pendant une conférence de presse organisée ce lundi 5 septembre, un journaliste de LCI demanda à Christophe Galtier pourquoi son équipe ne prenait pas davantage le train. Après un fou rire partagé avec Kylian Mbappé, l’entraineur ironisa sèchement : « On est en train de voir si on ne peut pas se déplacer en char à voile ».

Pour certains, c’est une mauvaise blague mais pour d’autres, c’est du dédain et un mépris total envers la cause environnementale.

La polémique a pris de l’ampleur et est maintenant au cœur des débats. En sont sorties plusieurs questions dont celle de la faisabilité du déplacement en train.

Pour y répondre, il faut bien cerner le problème : l’on reproche ici au club de ne pas prendre le train lorsque c’est possible. Evidemment, il parait compliqué de se déplacer sur plusieurs centaines de kilomètres en enchainant les arrêts tout en gardant les joueurs en pleine forme pour le match (ce qui nous rappelle le côté intrinsèquement pollueur des matchs longue distance).

Une option convaincante

Néanmoins, le train semble être une option convaincante. Tout comme les aéroports, les gares sont sécurisées. Pour un budget qui, selon plusieurs estimations, est comparable à un déplacement en avion, la SNCF pourrait également mettre au service du club un train privatisé (le reste des wagons pourra notamment être rempli par des supporters officiels). De plus, si les lignes à grande vitesse sont souvent fermées la nuit pour entretien, il est possible de décaler ces travaux afin que l’équipe rentre chez elle.

Mais qu’en est-il de leur réputation d’infatigables retardateurs ? La SNCF joue en effet d’une effroyable image ce qui renforce le débat public en faveur de l’avion, jugé plus sûr. Cependant, si on prend le cas du dernier match en date, Nantes-PSG, l’avion a dû se déplacer de Nantes à l’aéroport de Saint Nazaire (12 minutes de trajet à vide) et les joueurs ont donc dû rejoindre ce dernier en bus à la suite de leur victoire 3-0 face aux Canaris. En outre, depuis le printemps dernier, l’aéroport de Nantes n’accepte plus les décollages et atterrissages de minuit à 6h afin de répondre aux protestations des habitants. Il n’est donc pas disponible de nuit…comme les gares SNCF habituellement (mais on le rappelle, elles peuvent ouvrir de nuit si un arrangement est trouvé pour décaler les travaux sur les voies).

Certaines équipes professionnelles (ici Rennes) ont déjà opté à plusieurs reprises pour le déplacement en train. Crédits : SRFC

Mais alors, qu’est ce qui coince ? Pourquoi le club français ne prend-t-il pas plus régulièrement le train ? Premièrement, il faut savoir que des négociations sont censées être en cours entre le PSG et la SNCF. En effet, le club n’est pas un fervent opposant aux voyages en train. L’équipe féminine l’emprunte d’ailleurs régulièrement. Que ce soit du fait de la SNCF ou du club, les négociations ont cependant l’air bloquées. Tout l’enjeu est donc de les redémarrer afin de trouver un accord pour se diriger vers des déplacements davantage décarbonés.

Selon une étude de la LFP, sur l’ensemble des matchs de la saison 2019-2020 de Ligue 1 et de Ligue 2, 65 % des trajets ont été effectués en avion, 31 % en bus et seulement 4 % en train.

Changer de train-train quotidien

En outre, les déplacements en train sont bien moins polluants que ceux en avion. Mais au-delà de l’impact direct de la diminution des émissions de GES, c’est tout un mode de vie qui serait remis en question. C’est symbolique. De fait, quoi de mieux pour sensibiliser la population entière à la cause environnementale que des stars de football portant un message écologiste ?

Récemment (voir article du 02/09), Vincent Lindon imaginait un grand joueur de football boycotter la coupe du monde au Qatar notamment pour raison écologique. Il semblerait bien que ce ne soit pas Kylian Mbappé...

Comme l’ensemble de la société, le milieu du football va devoir embrasser la sobriété. Mais en est-il seulement capable ? La réaction des deux membres du PSG nous envoie malheureusement un mauvais signal. Peut-être surestimons-nous alors la capacité et la volonté d’adaptation du football lui-même ? En effet, on peut s’interroger sur la compatibilité du football international, et les énormes enjeux financiers qui régissent la FIFA, avec la sobriété qui s’imposera inéluctablement.

Selon le New York Times, Gianni Infantino, le président de la FIFA, étudierait l'idée d'une nouvelle Coupe des confédérations ou d'une Ligue des nations internationale afin de générer de nouveaux revenus...et de nouvelles émissions.

Dès lors, la polémique n’est pas futile. Elle met en exergue le manque de volonté des clubs à voyager en train, le manque de couverture ferroviaire (on comprend que les clubs veulent se déplacer en ligne directe) et l’inquiétante inconscience écologique qui semble régner dans le monde du football.

D’un autre côté, la polémique a eu pour effet de lancer une réelle interrogation sur les modes de déplacement des clubs de foot. Paradoxalement, par leurs réactions particulièrement interpellantes, Mbappé et Galtier ont accéléré le débat sur la question, dévoilant peut-être leurs vrais visages. Mais s’ils s’étaient contentés de faire la langue de bois, le débat en serait resté au statu quo.

Par esprit chauvin assumé, on espère tout de même la victoire du PSG ce soir face à une Juve dont elle aurait peut-être à apprendre étant donné que le club italien s’est déjà fait remarquer en ayant conclu un accord avec Trenitalia (la société ferroviaire italienne) par le passé.

Cristiano Ronaldo dormant dans un train après la victoire de la Juventus en coupe d'Italie le 19/05/2021. Crédits : Instagram de Ronaldo
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Le régime végan est-il vraiment sain ?

Depuis plusieurs années, le mouvement sans viande est apparu, en conséquence directe du développement de l’industrie de l’élevage En Occident du moins, la proportion des personnes adoptant des régimes non carnés augmente de plus en plus. En 2020, en France, ils étaient 2,2% selon l’Ifop. Pourtant, l’on en parle abondamment, d’une part pour vanter les mérites écologiques et pour la santé, et d’autre part pour décrier ce régime qui serait anormal et qui ne répondrait pas à nos besoins.

Tout d’abord, l’alimentation des Français est diverse. Et si 74% se déclarent omnivores, il est évident que tous ne s’alimentent pas de la même manière. De plus, il faut bien cerner les différentes nomenclatures de tous ces régimes. Entre végétarien, végétalien, flexitariens et autre, on s’y perd facilement. En voici quelques-uns :

  • Régime omnivore : composé d’aliments d’origine animale et végétale.
  • Régime flexitarien : principalement végétarien, mais incluant occasionnellement de la viande ou du poisson (pas de définition universelle).
  • Régime végétarien : sans viande ni poisson. On retrouve toutefois des produits d’origine animale tel que du lait.

Régime végétalien (végan) : sans aliments issus de l’exploitation animale (y compris le lait et les œufs).

C’est ce dernier qui nous intéresse : est-il adapté à l’homme ? N’y a-t-il pas de risque de carence alimentaire ?

Le saviez vous ? Il y a seulement 0,3% de Français ayant adopté un régime végetalien (végan). Étude Végétariens et flexitariens en France en 2020, Ifop.

« Pas de risques a priori »

Pour la Professeur Irène Margaritis, chef de l’unité d’évaluation des risques liés à la nutrition à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses), « ce régime en lui-même ne présente a priori pas de risque s’il est bien pratiqué, mais cela nécessite une vigilance toute particulière et de se faire aider par un médecin nutritionniste ou un diététicien » Et d’ajouter qu’ « un régime végétalien suivi sans connaissances peut avoir des conséquences dramatiques ». L’alimentation est un savant calcul auquel peut aussi bien répondre l’omnivorisme que le végétalisme. Néanmoins, ce dernier est plus difficile à mettre en place à l’heure actuelle du fait d’un manque de connaissance, d’une production alimentaire dirigée vers la demande en viande ainsi que de la culture française où la viande est très représentée.

Dans sa vidéo YouTube "VEGAN PENDANT 1 MOIS : J'ARRÊTE TOUT ?!", Eric Flag (coach en développement physique et mental) change radicalement de régime et livre une conclusion plutôt favorable en insistant sur le fait de notamment adapter ses apports caloriques.

Selon Santé Publique France, le régime végétalien n’est « pas adapté pour tout le monde ». Ou plutôt, les carences s’accumulent chez les plus fragiles (femmes enceintes et enfants en bas âge). Des carences pouvant cependant tout à fait être comblées par des produits alternatifs ou des compléments alimentaires. En outre, le fer, le calcium, l’iode, les vitamines D et B12 ou même les protéines ne sont pas le monopole des produits carnés. Benjamin Allès, chargé de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (Inra), expliquait à Libération en 2018 : « Une première étude aux Etats-Unis rapporte que des individus qui consomment beaucoup de produits végétaux transformés et peu de produits bruts se retrouvent avec de plus forts risques de maladies cardiovasculaires tout comme les individus qui consomment beaucoup de produits animaux transformés » (ici, une étude de juillet 2017 penche en ce sens, peut-être est-ce celle que le chercheur a mentionnée). Ainsi, il n’y a pas de régime miraculeux. Tout dépend de son application.

« Plusieurs caractéristiques des aliments ultra-transformés conduisent à penser qu’ils pourraient avoir des effets négatifs sur la santé, comme le suggèrent une vingtaine d’études épidémiologiques publiées récemment en France et à travers le monde »

Tout est question d’équilibre

A l’heure où 59% des adultes et près d’un enfant sur trois sont aujourd’hui en surpoids (IMC>25) ou obèses (IMC>30), l’enjeu sanitaire est avant tout de manger plus équilibré, ce que n’assure aucun régime en lui-même. On imagine mal expliquer qu’un enfant nourri au Big Mac est en meilleure santé qu’un autre végétalien suivi par un nutritionniste (toutes choses égales par ailleurs, évidemment).

En Europe, 59% des adultes et près d'un enfant sur trois sont aujourd'hui obèses ou en surpoids.

En résumé, le régime végan est un régime difficile à s’approprier à l’heure actuelle. Celui qui s’en saisit doit impérativement connaitre ses besoins alimentaires par le biais – du moins temporaire – d’un professionnel de la santé. Néanmoins, le régime végétalien à un autre avantage inhérent à sa nature : il exclut la consommation de produits d’origine animale dont leur production est responsable d’importantes pollutions de l’environnement notamment par le biais de gaz à effets de serre (l’élevage est responsable de 15 % des émissions de GES dans le monde).

indecanicule2022

« Il fait tellement chaud, c’est intenable » : En Inde, une vague de chaleur fait rage depuis 2 mois

Sous le silence assourdissant de la plupart des médias, l’Inde est en train de suffoquer. Avec plus de 40°C parsemant son territoire ainsi que celui de son voisin pakistanais, cet épisode de chaleur extrême additionné à un important déficit pluviométrique nous apparait comme un avertissement. Telle une entrevue du futur de l’humanité. Les experts sont clairs : les évènements climatiques extrêmes vont augmenter en cadence ainsi qu’en intensité, au grand dam des populations les plus pauvres.

Températures Samedi 30 avril à 14h heure française et environ 17h heure locale. A minuit, il fera environ 27°C (prévisions) Données fournies par Windy.

5 à 7°C au dessus des normes

Alors que l’Inde est concernée par le phénomène de La Niña, (mise en place d’une anomalie froide de température), elle présente tout de même des records de températures pour le mois de mars (33,1°C). Mais depuis quelques jours, ce sont d’autres chiffres qui attirent notre attention : 43°C, 45°C …soit plus de 5 à 7°C au-dessus des normales de saison. La région est devenue une véritable fournaise, contribuant à embraser les montagnes de déchets parfois hauts d’une centaine de mètres jonchant allégrement les rues des grandes villes. Des fumées toxiques et nauséabondes s’élèvent alors, se dirigeant vers les habitats environnants.

On distingue à peine les silhouettes des habitants de New Delhi qui regardent l'incendie qui fait rage sur une décharge de la capitale indienne le 26 avril 2022. AFP

Une chaleur inégalitaire

Ces hausses de température concernent plus d’un milliard de personnes, mais ne les impactent pas de la même façon, évidemment. En outre, les ouvriers continuent de travailler sur les chantiers de construction. « Je suis payé au jour le jour, si j’arrête, je ne suis pas indemnisé », explique au Monde un maçon, sans se plaindre. Les habitants les plus pauvres paient de leur santé voire de leur vie des conséquences maintenant clairement instituées comme anthropiques.

Ces évènements de chaleur ne sont pourtant pas rares dans la région : « Il fait tellement chaud, c’est intenable. Normalement, en mars-avril, il fait doux, c’est le printemps, ce sont les mois de mai-juin-juillet qui sont très chauds. Là, il fait déjà très lourd. », expliquait une habitante de New Dehli. « C’est la première fois que je vois une telle chaleur en avril », témoignait une autre à France Info.

Près d’un quart des récoltes perdues

Loin de s’arrêter à quelques gouttes de sueur, cette canicule est meurtrière. Depuis 2010, l’AFP a décompté plus de 6 500 morts en Inde. Au-delà des pertes humaines – que l’on peut comparer à celles de la canicule de 2003 qui avait causé près de 20 000 morts en France -, cet épisode de chaleur cause bien des maux aux secteurs agricole et énergétique.

En outre, les autorités indiennes estiment que 20 à 25% des principales récoltes auraient été perdues. L’Inde pensait pouvoir exporter du blé afin de pallier le manque de production que conduit l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Le climat exceptionnel a vite brisé ce rêve, mettant davantage en danger les besoins de sa propre population.

Un cercle vicieux

Aussi, la situation a créé une augmentation conséquente des besoins énergétiques indiens, faisant augmenter ces derniers jusqu’au pic encore jamais atteint de 201 066 gigawatts. Le mix énergétique de l’Inde étant composé à 75% d’énergies fossiles, (dont + de 40% de charbon), ces chaleurs extrêmes créent un cercle vicieux : plus on utilise de l’énergie, plus on devra en utiliser dans le futur. Les distributeurs d’énergie ont déjà coupé l’électricité dans plusieurs millions de foyers au Pakistan et en Inde. Et pour cause : les centrales à charbon manquent de carburant.

Mix énergétique de l'Inde (1990-2019) en térajoule. IEA. Ce pays émergent produit presque exclusivement de l'énergie à partir de méthodes fortement polluantes.

Un exemple criant

La situation actuelle est un exemple criant de la gravité des changements climatiques qui nous attendent. A cause du principe d’inertie climatique, nous sommes en partie impuissants face à la probabilité de voir ces phénomènes, aujourd’hui encore plutôt rares, se multiplier. Si des épisodes de chaleur que l’Inde se manifestaient tous les 50 ans, ils devraient désormais apparaitre tous les 4 ans selon Mariam Zachariah, chercheuse au Grantham Institute de l’Imperial College de Londres.

L’Inde devrait connaitre un mois de mai pire encore, qu’en sera-t-il de ses 1,3 milliard d’habitants ? Comment vont-ils gérer cette crise multiforme ?

Selon de nombreux spécialistes, de plus en plus d’habitants migrent pour fuir cet enfer, et cela va continuer. Pour Fabio D’Andrea, chercheur au CNRS au laboratoire de météorologie dynamique de l’Ecole normale supérieure à Paris, « le changement climatique, qui nous porte vers des températures encore plus élevées, pourrait rendre ces régions complètement inhabitables. » L’Europe aura-t-elle son rôle à jouer notamment dans l’accueil de migrants climatiques se faisant ainsi de plus en plus nombreux ?

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Les éoliennes représentent-elles un danger pour notre santé ?

Parfois désignées comme les grandes profanatrices de notre paysage, de notre faune et de notre souveraineté, les éoliennes seraient encore plus diaboliques et impacteraient notre santé. Sans renier que certaines installations sont plus impactantees que d’autres parmi un tas de facteurs objectifs pouvant détériorer notre santé, et que donc certaines luttes anti éolienne sont tout à fait légitimes, on peut remettre en cause les nouveaux dogmes farfelus d’une minorité d’anti éolien. Qu’en est-il réellement ?

Si vous habitez à la campagne, vous avez peut-être déjà vu, aux abords d’un bourg ou d’une rue passante, des panneaux protestant contre des projets éoliens qui poussent tel des champignons en France. Les éoliennes inquiètent. Concernant notre santé, deux de nos sens seraient particulièrement impactés selon certains : la vue et l’ouïe. En outre, les éoliennes, quand elles tournent (soit plus de 80% du temps selon EDF), interfèrent avec les rayons du soleil, ce qui produit un effet stroboscopique. De plus, elles émettraient des sons gênants, que ce soit par le bruit des pales qui brassent le vent ou par les infrasons qu’elles produisent.

Que prévoit la loi française ?

En premier lieu, il est nécessaire de préciser qu’un cadre législatif entoure la mise en place d’un parc éolien. La loi prévoit des études acoustique, paysagère et écologique. D’autres aspects peuvent également être étudiés, notamment la réception tv, la géologie ou les ombres portées. Aussi, doit être menée une « enquête publique avec affichage dans un rayon de 6 km autour du lieu envisagé pour l’implantation des éoliennes ». Cette consultation des riverains est une occasion d’user de son pouvoir citoyen et elle conduit souvent à la réalisation d’études supplémentaires. Néanmoins, les études sont très souvent contestées ; les habitants sont assez peu confiants quant à la justesse de ces dernières. Parfois, les résultats d’études non obligatoires ne sont d’ailleurs pas publiés.

De plus, il se pose la question de la légitimité des études. Par exemple, la géobiologie n’est pas reconnue comme étant une science (même si certains travaillent pour l’Etat). Cette technique pourrait servir à détecter les courants d’eau souterrains et palier aux risques de transmissions de courants électriques. C’est en tout cas ce qu’explique Olivier Ranchy, conseiller en géobiologie à la Chambre d’agriculture Pays de la Loire – on résume couramment son travail par l’appellation de « sourcier ». « Lorsqu’elles [les éoliennes] sont implantées dans une zone neutre sans faille ni cours d’eau, le risque est minime. En revanche, la construction d’une fondation avec 50 tonnes de ferraille et 100 toupies de béton (1 200 m3) peut entraîner des perturbations plus ou moins fortes si une veine d’eau court jusqu’au bâtiment d’élevage en transportant l’électricité », expliquait-il à Ouest France. Que l’on croit ou non à cette pseudo science, l’enjeu soulevé par le « sourcier » reste le même : mieux sonder le sous sol des projets éoliens afin de prévenir les risques liées à la santé des humains, mais aussi des animaux.

Hormis les doutes – parfois très peu fondés -, les études d’impacts et de dangers couvrent une bonne partie des effets potentiellement néfastes des éoliennes. Et pourtant, nombre de facteurs qui font l’objet de ces études continuent d’être pointés du doigt. En plus de ces études sur des cas particuliers, il faut ajouter les études et recherches à plus grande échelle. Mais, semble-t-il, qu’importe les articles scientifiques, les meta-analyses, l’humain semble plus sensible aux cas extrêmes, à fortiori s’ils sont partagés par des proches – pas plus spécialistes pour autant.

L’effet stroboscopique

Si l’effet stroboscopique produit par les éoliennes ne conduit pas directement à des problèmes de santé, il peut néanmoins être un vecteur de stress. Mais le poids de ce phénomène nous apparait bien diminué dès lors que l’on ajoute qu’il n’apparait qu’un temps réduit dans l’année du fait de la position du soleil par rapport à l’habitation. Selon le journal Le Monde, des flashs lumineux n’apparaitraient « qu’en moyenne 3/4 d’heure par jour 3 mois par an ». Soit autant que nombre d’activités gênantes, telles que sa sœur mettant de la Kpop dans la maison par exemple. On pourrait aussi ajouter qu’on s’y habitue, mais on s’habitue aussi aux défaites de Saint Étienne, sans pour autant qu’on s’en réjouisse. De plus, les pales des éoliennes devraient tourner 3 fois plus vite (et les bouts de ses pales atteindraient le mur du son !) pour que les effets stroboscopiques deviennent dangereux pour les épileptiques.

Ce phénomène est donc sur exagéré : il ne conduit pas à des problèmes de santé dont l’éolien serait novateur ou aurait l’exclusivité, sans toutefois qu’il soit un non-évènement et ne puisse pas être désagréable.

En même temps qu’elles tranchent la lumière d’Hélios, les pales des éoliennes se confrontent à une autre divinité grecque : Éole. Le lien qu’elles entretiennent avec lui est tout indiqué, puisque c’est ce dernier qui leur confère leur nom et l’énergie mécanique nécessaire à nos besoins – ou envies – électriques. Malheureusement, ce procédé est bruyant. Aux pieds d’une éolienne tournant à plein régime, les « woush » sont impressionnants (55 dB). Mais à 500m – soit la distance minimum légale entre une éolienne et une habitation – le bruit est bien moins audible (environ 35 dB ; sans compter que le volume varie en fonction de la topographie, de la végétation, etc.), et serait même moins fort qu’une conversation à voix basse selon l’Ademe. A noter que les éoliennes les plus récentes sont moins bruyantes car plus aérodynamiques. Le « problème sonore » tendrait donc à se réduire.

Ajoutons également que les chercheurs prennent très au sérieux l’installation des éoliennes et leurs conséquences sonores. J’en veux pour preuve le projet PIBE qui a pour objectif « d’améliorer les méthodes de prévision de l’impact sonore des éoliennes et d’étudier des solutions de réduction du bruit et leur efficacité, aussi bien en conditions maitrisées qu’en conditions réelles ».

Une sensibilité biologique et psychologique

Et ce n’est pas une mince affaire. En outre, nous ne sommes pas égaux face aux bruits : notre sensibilité n’est pas la même. De manière purement biologique – notre capacité à entendre – mais aussi de manière psychologique. Loin de dire que le bruit des éoliennes n’existe que dans l’imagination des riverains, il me parait probable (et des études citées plus bas le concluent de manière similaire) que plus on est soumis à un discours anti éolien, plus le bruit des éoliennes est amplifié, virtuellement. En réalité, ce n’est pas le bruit objectif qui nous gène mais notre perception de celui ci. Il pourrait même jouer le rôle de bouc émissaire ; on se plaindrait du bruit pour ne pas avoir à critiquer un autre aspect moins critiquable de l’éolienne.

La critique de l’éolien régulée selon le groupe

Critiquer le bruit est une interrogation légitime, socialement bien accueillie par tous, contrairement à la critique de l’éolienne selon l’émission de pseudos infrasons par exemple. Illustrons ce propos : imaginons qu’une personne vote régulièrement pour le FN, un parti qui se caractérise par une approche extrêmement critique des éoliennes et plus encore de la technologie éolienne elle-même. Un jour, cette personne apprend qu’un parc éolien est en projet à côté de chez elle. Il lui faut réagir, et il est bien plus tolérable d’arriver dans le débat avec l’argument du bruit ou de l’esthétique qu’avec celui, bien plus politique et radical, qui conviendrait à bannir tout projet éolien, où qu’il soit construit.

Pour continuer à débattre et donner son opinion entre pairs et ne pas paraitre trop éloigné, trop extrême, il est préférable de s’adapter et d’opter pour une réponse mieux acceptée – mais pas moins contestable. En somme, il existe une sorte de contrat implicite entre tous les membres du groupe qui définit les critiques acceptées. Mais nous nous éloignons quelque peu du sujet ; retenons ici que le bruit ou l’esthétique ne sont parfois pas les réelles inquiétudes des individus. Parfois, on peut pointer du doigts d’autres nuisances induites par les éoliennes, des nuisances qui font l’objet de bien peu – voire pas du tout – de reconnaissance scientifique.

Infrasons nocifs

Ce qui inquiète parfois davantage dans les chaumières, ce n’est pas ce qu’on entend, mais ce qu’on n’entend pas. Paradoxal ? Point du tout ! Il faut savoir que, comme de nombreux appareils de la vie courante (machines à air conditionné, frigos, voitures, subwoofer, …) et même à la manière de la nature (tonnerre, vagues, tornades, vent…), les éoliennes produisent des infrasons, des sons inférieurs à 20 hertz. Bien qu’inaudibles, nous pourrions en subir les conséquences. Mais comme le rappelait l’institut national de recherche et de sécurité (Inrs) en 2006, « les effets physiologiques des infrasons, comme ceux de tous les bruits, dépendent du niveau reçu ». C’est surtout le monde du travail – et plus précisément le milieu ouvrier, là où les usines contiennent de nombreuses machines émettrices d’infrasons – qui serait impacté. Les éoliennes sont loin d’avoir le monopole des infrasons ; dans un village de Saône-et-Loire, on ne sait même pas ce qui provoque les infrasons. Mais à la différence de l’océan ou des usines par exemple, les éoliennes touchent à un domaine plus sensible, celui du privé et de la campagne. D’ailleurs, c’est souvent un critère d’installation : la campagne est réputée pour être silencieuse en contraste avec la ville bruyante. Le moindre soupçon d’infrason est donc rendu intolérable, d’autant plus que l’éolienne « envahit », à contrario de la mer, du vent dans les arbres ou des machines dans les usines qui précèdent notre venue. De ce point de vue, l’éolien est davantage comparable à la voie express.

Néanmoins, avec l’avènement des éoliennes, on s’est légitimement demandé quelle conséquence les infrasons que ces dernières produisent pourraient avoir sur notre santé. On peut d’ailleurs préciser que si « éolienne » semblent être le terme le plus usité pour parler de ces installations, certains opposants préfèrent parler de « machines industrielles » afin de contraster avec l’image écologique et toute verte que l’on pourrait s’en faire. Oui, l’éolienne est une machine en plein air, mais leurs conséquences sont-elles similaires à celles que subissent les ouvriers par exemple ?

Le syndrome éolien

Des études ont donc été menées afin de déterminer si les éoliennes provoquaient des troubles physiologiques sur les habitants à proximité.

En 2009, le Docteur Nina Pierpont autopublia une étude aussi erronée que bouleversante intitulé Wind Turbine Syndrome: A Report on a Natural Experiment, lequel mettait en lumière 12 symptômes qui, regroupés, forment le syndrome éolien (ou Wind Turbine Syndrom, WTS). Si elle n’a jamais été publiée dans une revue scientifique et validée par d’autres scientifiques, cette étude a joui d’une importante popularité chez les anti-éoliens, qui brandissent l’ouvrage sans cacher leur joie de pouvoir citer un docteur. Le gros problème de cette étude est la méthodologie. L’étude s’est seulement concentrée sur 10 foyers, soit 38 individus qui ont été confrontés à des éoliennes. Il a été étudié leur situation avant, pendant et après leur exposition aux éoliennes. Dans ces familles, au moins une personne devait, entre autres, « être gravement affecté par le fait de vivre près des éoliennes et devaient avoir pris des mesures drastiques pour se protéger de l’exposition aux éoliennes ». Nina Pierpont a donc délibérément choisi des personnes convaincues de la responsabilité des éoliennes sur leur état de santé.

En plus d’être basée sur une méthodologie plus que douteuse donc, l’étude s’appuie sur une explication simpliste : les éoliennes sont nocives car quand les habitants partent de leur domicile, ils n’ont plus de symptômes. Mais en lisant l’article de L’Inrs cité plus haut, une phrase retient notre attention et viendrait casser le sophisme précédemment présenté : « La rémanence des symptômes a été notée, alors que la source est supprimée, les sensations de malaise peuvent perdurer quelque temps ». Autrement dit, les effets des infrasons peuvent durer dans le temps et ne disparaissent pas caricaturalement dès qu’on sortirait d’une soi-disant zone polluée. De plus, selon l’Académie nationale de médecine, ces fameux symptômes « ne semblent guère spécifiques et peuvent s’inscrire dans ce qu’il est convenu d’appeler les Intolérances Environnementales Idiopathiques [IEE] ». Ces dernières définissent en fait les « symptômes récidivants non spécifiques attribués à une faible exposition à différentes substances fréquentes dans l’environnement » et sont souvent liées à l’hypersensibilité aux champs électromagnétiques. Rien de spécifique aux éoliennes donc.

Pourtant, Nina Pierpont se permet de tourner en dérision ceux qui se moquent de son syndrome éolien, parce qu’ils ne sont ni scientifiques et qu’ils n’habitent pas « dans l’ombre d’éoliennes ». Selon sa logique donc, seuls les spécialistes auraient leur mot à dire ; ces mêmes spécialistes qui renient en masse son travail – quoiqu’en disent les commentaires positifs au début de son ouvrage.

Le 8 juillet 2021, le tribunal de Toulouse a même reconnu ce syndrome éolien, donnant raison aux plaignants qui se disaient en proie à des nausées, saignements de nez, et même à des pertes de connaissance. Cette décision provoqua un tollé, mais fut considérée comme une réelle victoire chez les anti-éoliens qui espèrent qu’elle fera jurisprudence.

Des études plus sérieuses

En réalité, la majorité des études un tant soit peu scientifiques sur le sujet conclut que les éoliennes sont inoffensives de par la faible puissance de leurs infrasons. La gêne proviendrait davantage de points de vues conscients ou inconscients, comme semblent le prouver de nombreuses études.

« Aucune association claire ou cohérente n’est établie entre les sons émis par les éoliennes et toute maladie ou tout autre indicateur d’effet néfaste sur la santé humaine »

Massachusetts Institute of Tecnology (MIT), 2014.

D’après deux études françaises récentes (2017) respectivement dirigées par l’Anses et l’Académie nationale de médecine, la question pâtit tout d’abord d’un manque de connaissance scientifique quant aux effets des infrasons éoliens, ce qui laisse le champ libre à divers élucubrateurs. Dans son rapport, l’Anses remarque en effet que « les sources secondaires [articles de presse, chroniques radio, livre, etc.] sont nombreuses alors que le nombre de sources primaires [étude scientifique, enquête, etc.] qu’elles sont censées synthétiser est limité. » Et d’expliquer que « cette particularité, ajoutée à la divergence très marquée des conclusions de ces revues, montre clairement l’existence d’une forte controverse publique sur cette thématique ». Les éoliennes inquiètent beaucoup alors que le sujet ne fait pas vraiment débat au sein de la communauté scientifique.

« [Les « symptômes éoliens »] correspondent cependant à un ensemble de manifestations pouvant être consécutives à un stress, à la perte de sommeil, qui peuvent devenir handicapantes pour le sujet qui les ressent. »

Rapport de l’Anses, 2017

Dans une étude allemande joliment dénommée Machbarkeitsstudie zur Wirkung von Infraschall (2014), l’Agence fédérale de l’environnement explique qu’« à ce jour, il n’existe pas de connaissances scientifiquement établies prouvant un impact négatif des infrasons en dessous du seuil de perception [100 dB(G)], même si de nombreux articles de recherche postulent des hypothèses en ce sens ». Ainsi, la pseudo nocivité des éoliennes tiendrait… en des hypothèses. Rien de prouvé donc.

Un effet nocebo

Les deux études françaises constatent également un effet nocebo : les habitants créent inconsciemment leurs symptômes à cause d’informations qu’ils pensent vraies. « En d’autres termes, la crainte de la nuisance sonore serait plus pathogène que la nuisance elle-même », conclut l’Académie nationale de médecine (page 11 du rapport de 2017 précédemment cité). Une étude australienne à grande échelle de 2013 explique par exemple qu’un individu vivant à moins de 5 km d’un parc éolien sur 250 s’est déjà plaint des éoliennes. Parmi ce faible pourcentage, 72% mettent en cause un parc éolien directement visé par des groupes anti éoliens. La plainte serait donc le fruit non pas de l’éolienne, mais du discours autour de cette dernière. De plus, une étude néozélandaise menée en double aveugle conclut très clairement que plus un individu s’attend à être impacté de manière négative par les infrasons, plus il le sera, alors même lorsque ces mêmes infrasons n’entrainent aucune gêne chez celui étant non conscient de la pseudo dangerosité des infrasons éoliens. Une autre étude menée par la même chercheuse, Fiona Crichton, psychologue de la santé à l’université d’Auckland, conclut que les symptômes dits « éoliens » peuvent être atténués voire supprimés une fois que l’individu atteint est au fait de l’effet nocebo ainsi que de la non-nocivité des éoliennes.

La France abrite également RIBEolH, un projet d’étude qui a récemment débuté et qui a pour but d’évaluer « les effets sur la santé du bruit audible, en particulier des sons basse fréquence (SBF), et des infrasons, émis par les éoliennes ».

La santé est multiforme

Fiou, vous voilà maintenant abreuvés d’études scientifiques. Et leur constat est quasiment unanime. Néanmoins, ces dernières n’ont d’yeux que pour les infrasons : aucune ne parle de gêne plus indirecte. Aucune ne mesure précisément la peine éprouvée par les riverains des éoliennes, une peine qui n’est pas forcément visible, pas nécessairement physique. On oublie trop vite que la santé est multiforme :

« La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. »

Définition de la santé de l’OMS.

Le bruit, les infrasons et l’effet stroboscopique ne sont pas les seules conséquences des éoliennes. Certes elles sont les conséquences les plus directes, mais il en existe de bien plus indirectes et sournoises. On peut penser, par exemple, à la dévalorisation du bien du fait de la proximité du domicile avec un parc éolien. Ou bien même du fait que l’éolienne nuise au paysage. Pour un riverain, il est clair qu’une perte d’argent accompagné par un paysage moins beau, ça ne peut pas être positif. Encore faut-il prouver cette pseudo baisse – alors qu’on parle plutôt d’impact « quasi nul » – et expliquer en quoi une éolienne rend la vue si moche, ce qui est un critère totalement subjectif…

Jusqu’au complotisme

Au bout d’un certain moment, la méfiance vis-à-vis des scientifiques et de leurs conclusions devient fatiguant, et cela peut même aller jusqu’à du complotisme. Il fallait bien mettre un mot là dessus. C’est sûr que l’organisation d’un complot expliquera bien des phénomènes inexpliqués : si la science dit que les éoliennes ne sont pas si nocives que ça, ce serait parce qu’ils mentent ou plutôt qu’« on » les fait mentir. D’accord, si on veut, mais le débat sort alors des sentiers battus : comment débattre sans d’autre preuves que les conclusions d’un pseudo scientifique dont la méthodologie est totalement foireuse ? Et bien on ne peut pas. La seule solution est de tester scientifiquement nos hypothèses. Si elles ressortent du bain méthodologique, alors tant mieux, sinon eh bien tant pis. Les résultats des études que je vous ai présentées ont tous résisté à la méthode scientifique. Et les enseignement de ces dernières indiquent entre autres une proéminence des discours sur les faits concernant le danger éolien.

Bien loin de moi toutefois l’idée de dire que, puisque dire du mal des éoliennes nous tourmente, il faut se bâillonner et prendre la pilule bleue. Au contraire, cet article a pour dessein de traiter la question sanitaire avec sérieux et honnêteté. C’est cette réflexion qui me mène à penser qu’en fin de compte, la vraie nocivité des éoliennes se terre dans un débat public houleux et non-scientifique plutôt que dans ses infrasons ou ses ombres. La plus grande menace que notre santé subirait serait-elle du fait des contestataires qui s’arment de concepts fallacieux ?

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L’Europe peut-elle supporter un embargo sur le pétrole russe ?

La question de le dépendance énergétique est un sujet majeur en cette période de guerre. L’Union Européenne essaie tant bien que mal de se parer d’une pseudo indépendance énergétique. Du moins, elle serait capable d’atteindre ce niveau. Or, comme nous le rappelions dans un article précèdent, l’Europe est indéniablement dépendante de la Russie.

Dépendance énergétique russe en Europe par rapport à la consommation intérieure brute. Carte : Le Grand Continent.

Le « taux de dépendance »

Premièrement, il parait utile de rappeler le lien entre les importations et la consommation d’un pays. En outre, les pays qui apparaissent les plus dépendants sur la plupart des cartes partagées par les médias ne le sont pas toujours de la façon dont on l’entend. L’on parle souvent de la part des importations russes par rapport aux importations totales. L’on en voit bien vite la limite lorsque l’on étudie le cas de l’Estonie. Si ce pays importe 100% de gaz et de charbon russe, les importations de ces deux sources d’énergie ne représentent qu’1,7 % de leur Consommation Intérieure Brute (CIB). Si l’on prend seulement en compte les importations, on oublie qu’un pays peut aussi produire localement et par d’autres moyens sur lesquels la Russie a peu d’influence, tels que la plupart des énergies bas carbone. C’est d’ailleurs le cas en Estonie où la majorité de l’énergie produite par charbon provient d’entre ses frontières.

La réelle dépendance énergétique est donc mise à jour par la part des importations de sources d’énergie russes par rapport à la CIB laquelle est concrétisée par un certain « taux de dépendance » énergétique.

Le patrole en ligne de mire

Toujours est-il qu’après avoir déclenché un embargo sur le charbon russe le mois dernier – plutôt symbolique car peu d’États européens en dépendent fortement – Ursula von der Leyen cible maintenant le pétrole. Le 4 mai dernier, la présidente de la Commission européenne expliquait : « L’UE devrait renoncer aux livraisons de [pétrole] brut dans les six mois et de produits raffinés d’ici la fin de l’année ». Et d’ajouter une volonté de réduire « au minimum les dommages collatéraux pour nous et nos partenaires ».

Les conséquences pourraient effectivement être énormes dans certains pays de l’Union Européenne, qu’elles soient au niveau socio-économique ou géopolitique.

Une ligne rouge franchie

Viktor Orban, le premier ministre de la Hongrie, a déjà fait savoir que Bruxelles allait trop loin : « nous avons clairement signifié dès le début qu’il y avait une ligne rouge : l’embargo sur l’énergie. Ils ont franchi cette ligne (…), il y a un moment où il faut dire stop ». En outre, 14% de leur CIB provient du pétrole russe (le charbon ne représentait que 0,3%). La Hongrie craint alors que les difficultés s’accumulent, d’autant plus que l’embargo sur le pétrole ouvre la voie à celui sur le gaz, dont les membres européens dépendent encore plus.

« Lorsque nous imposons des sanctions, nous devons le faire de manière à maximiser la pression sur la Russie tout en minimisant les dommages collatéraux pour nous-mêmes. »

– Valdis Dombrovskis, vice-président de la Commission européenne, au Times le 25 avril.

A court terme du moins, les 27 ne peuvent pas tous s’affranchir de l’or noir russe, ce qui met à mal la mise en place de l’embargo prévu par la Commission Européenne qui nécessite un accord unanime. Les États concernés cherchent donc à déroger à la règle, afin qu’ils ne bloquent pas la décision des membres les moins dépendants. Ainsi, la Hongrie menace d’utiliser son veto au cas où elle ne serait pas totalement exemptée. La Slovaquie (taux de dépendance : 16%) et la Bulgarie (14%) demandent, quant à elles, des dérogations moins radicales et d’autres États tels que la Grèce, Chypre et Malte, ont témoigné, lundi 9 mai, de la difficulté que pourrait représenter cette contre-attaque.

Le G7 gonfle les pecs

Au total, huit pays européens sont dépendant à plus de 10% du pétrole russe. Dans le même temps, Bruxelles assure faire en sorte que l’embargo soit progressif et adapté. Le 8 mai, les pays du G7 ont déjà fait savoir leur volonté d’arrêter progressivement d’importer du pétrole russe afin de « priver [Poutine] des revenus dont il a besoin pour financer sa guerre. » Néanmoins, ces pays membres, à savoir l’Allemagne, le Canada, les Etats-Unis, la France, l’Italie, le Japon et le Royaume-Uni, sont peu dépendants (excepté l’Allemagne) du pétrole russe. Cette décision ressemble alors davantage à l’embargo européen concernant le charbon russe : elle est symbolique.

Mais les pays les plus dépendants peuvent-ils se le permettre ? L’UE trouvera-t-elle de nouveaux approvisionnements en énergie ? Comment va-t-elle se sortir de cette crise ?

L’OPEP + timide

La Russie fournit près de 25 % du pétrole consommé dans l’Union européenne. Le Venezuela, le Moyen-Orient, les Etats Unis ou même la Norvège auraient pu être des solutions, seulement pour des raisons logistiques, ils ne peuvent nous soulager de notre dépendance russe.

Que dit l’OPEP+ dans tout cela ? Le cartel amélioré (dont fait partie la Russie) se montre bien frileux : la guerre en Ukraine n’étant pas source d’inquiétude pour le marché, elle ne sera pas la solution. Elle promet seulement d’augmenter sa production de 432 000 barils par jour pour le mois de juin. Un geste bien léger, témoignant d’une épée de Damoclès russe qui pèse au-dessus de l’organisation régulatrice.

L'OPEP+ nait en 2016. Aux 14 membres de l'OPEP s'ajoute 10 exportateurs de pétrole dont la Russie est le plus important.

Lorsqu’on ne veut plus dépendre du pétrole russe, il existe une autre solution si simple qu’on l’oublierait presque : baisser sa consommation de pétrole. En outre, si l’UE consommait un quart moins de pétrole, nous n’aurions plus besoin de la Russie. Évidemment, si l’on demandait à gégène de se déplacer à l’usine en vélo, il nous répondrait surement « vous voulez pas plutôt que j’y aille à cloche pied avec un bouquet de fleurs dans le derche ? ». Et il toucherait un point sensible : certains – et par extension, certains États – sont plus en difficulté face au défi de la sobriété.

– 2,7 millions de barils par jour

L’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) a notamment publié un rapport de 21 pages expliquant par 10 actions comment réduire la consommation de pétrole en particulier dans les pays développés. A la suite du constat sur notre dépendance et sur les mauvais augures planant sur le marché pétrolier, l’agence préconise de diminuer la demande de pétrole par des « actions gouvernementales et citoyennes » et « de viser en priorité les populations les plus pauvres, ainsi que ceux dont l’activité économique dépend en partie de la voiture » afin de pouvoir les accompagner au mieux. Le secteur des transports étant essentiel pour le marché du pétrole, l’AEI s’est concentrée sur ce secteur. Parmi les 10 mesures, l’on retrouve, l’abaissement des limites de vitesse sur l’autoroute, l’augmentations des voitures électriques ainsi que l’utilisation des transports en commun. La sobriété se révèlerait-elle comme une arme géopolitique en plus d’être une arme écologique ?

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Allemagne : l’exemple d’une transition énergétique ratée ?

Vendredi 13 janvier, TotalEnergies annonçait la mise en place de son terminal d’import de gaz naturel liquéfié (GNL, aussi appelé gaz de schiste). La guerre en Ukraine a indéniablement levé le voile sur la dépendance européenne envers la Russie en matière d’énergie. Le recours au GNL, anciennement boudé par nos voisins outre-Rhin, en est une conséquence directe. Ce revirement est également très politique. En effet, il s’inscrit parfaitement dans la levée de boucliers occidentaux – et notamment européens – contre l’invasion russe.

Après avoir suspendu la mise en fonction de Nord Stream 2 (gazoduc reliant la Russie et l'Allemagne, carte ci-contre), les Allemands ont décidé d'investir 1,5 Md dans...le Gaz naturel liquéfié, et, qui plus est...du Qatar.

La guerre en Ukraine a bon dos

Mais en réalité, tout cela dépasse la guerre en Ukraine. La dépendance à la Russie n’est qu’une conséquence des politiques menées depuis 20 ans en Allemagne. Des politiques ayant pour fer de lance la transition énergétique amorcée sous Angela Merkel (2005-2021) dans l’optique de se diriger vers un mix électrique dompté par les énergies renouvelables (EnR). Pourtant, malgré une Allemagne devenue le modèle européen de l’électricité verte – 4O% (données 2021) de son électricité provient d’énergies renouvelables -, le pays affiche aujourd’hui l’une des plus haute empreinte carbone par habitant d’Europe (8,70 tonnes par habitant en 2017, 5ème plus importante d’Europe) et le prix de l’électricité le plus élevé (31 c/kWh).

Mais alors, à quoi ont servi les efforts de l’Allemagne ? Tout s’est-il passé comme prévu, ou est-ce un échec complet ? D’abord, observons l’évolution du mix électrique allemand pendant l’ère Merkel :

La part du renouvelable est passée de 11% en 2005 à 50% en 2020. Fabuleux, non ? Infographie Le Monde.

Halte là, il ne faut pas oublier de distinguer le mix énergétique du mix électrique. En outre, l’électricité n’est qu’une source de production d’énergie. D’autres, souvent fossiles, produisent directement de l’énergie, sans passer par la « case électricité » (exemples : essence, chauffage au gaz). Ainsi, en Allemagne, l’électricité compose environ 21% du mix énergétique, contre 36% pour le pétrole, 26% pour le gaz et 8% pour le renouvelable et les biocarburants (Le Monde, 2021). Ainsi, selon l’Agence Internationale de l’Énergie (IEA) la part des énergies bas carbone dans le mix énergétique allemand s’élève à environ 20%, dont 2% de nucléaire (voir graphique ci-dessous) . C’est moins que la France, dont le mix énergétique est composé à environ 50% d’énergies bas carbone dont 40% de nucléaire.

« L’Allemagne s’est concentrée sur l’électricité en négligeant les transports, première source d’émission de CO2. »

Cécile Maisonneuve, ancienne directrice du centre énergie de l’Institut français des Relations Internationales (IFRI). Le Monde, 2019.

L’énergie allemande reste donc majoritairement fossile. Est-ce un aveu d’échec ? Car l’objectif de toute transition énergétique est justement de mettre en place des énergies décarbonées et donc de diminuer l’importance des plus émettrices en GES. Or l’Allemagne n’a diminué la part de ces énergies que de 7 points de pourcentage environ, le nucléaire se faisant remplacer par des EnR, ne changeant quasiment pas les émissions globales de GES.

Répartition des types de productions d'énergies en Allemagne (1990-2020). Source : IEA.

Le mix électrique n’est rien de plus que le haut de l’iceberg du mix énergétique. Il est bien plus attrayant de voir que 55% d’énergies renouvelables alimentent l’électricité allemande que la dure réalité qui est celle d’un mix énergétique dominé à près de 80% par de polluantes énergies fossiles. Angela Merkel semblait l’avoir bien compris. Quelques jours après l’accident nucléaire de Fukushima de 2011, Mutti choisit de sortir progressivement de l’énergie nucléaire, acclamée par une partie du peuple allemand. Hourra ! L’Allemagne allait sortir du nucléaire afin de construire des milliers d’éoliennes et de panneaux solaires ! Oui mais voilà, ces derniers n’ont remplacé que la moitié du nucléaire allemand, qui représente encore 11% de la production électrique allemande. De plus, ces types de production renouvelable sont intermittents, et il est alors nécessaire de mettre en place des énergies pilotables, qui sont en grande partie fossiles – puisque le nucléaire n’est plus une possibilité.

Délaissement du nucléaire

Celle qu’on surnommait la chancelière du climat (Klima Kanzlerin) aurait peut-être dû compter sur l’énergie nucléaire comme un moyen de transition entre le fossile et le renouvelable, mais, hâtée par les écologistes allemands, son devoir d’incarner une figure protectrice et les élections qui approchaient, elle engagea un processus qu’on sait aujourd’hui dans une certaine mesure inefficace. Certes, la question se jouait à l’époque sur la sûreté nucléaire, et on lui aurait reproché de ne pas avoir fermé le parc nucléaire si un accident s’était produit, mais le nucléaire civil était (et est toujours) si stratégique – voire prometteur – que l’ex chancelière ne peut que remettre en question les politiques qu’elle a engagées. D’ailleurs, en 1995, alors ministre de l’environnement, Angela Merkel avait prophétiquement déclaré ceci : « sans l’énergie nucléaire, nous ne pourrons pas atteindre nos objectifs en matière de réchauffement climatique ».

D’autant plus que la perte du nucléaire a rimé avec une forte dépendance, notamment envers la Russie. En outre, avant la crise énergétique actuelle, 34% du pétrole, 65% du gaz et 23% du charbon en provenait (Le Grand Continent, 2022).

« 10 ans de cette vie ont suffi à la changer en junkie. »

Telle une junkie donc, l’Allemagne doit combler ses besoins. Les relations qu’elle entretenait avec son dealeur – la Russie – étaient en train de se renforcer. Mais la Russie a voulu jouer sur un autre terrain propice à tout trafiquant, celui de la guerre de territoire. Par relation d’alliance (et non par souci démocratique au vu de son nouveau fournisseur), l’Allemagne se doit de changer de produit et de fournisseur. Quoi de plus naturel de se tourner alors vers le GNL et de se rediriger vers le Qatar !

« Manifestement la « transition » n’a pas les vertus décarbonantes que l’on peut voir mises en avant dans diverses publications institutionnelles – voire universitaires – allemandes… »

Jean-Marc Jancovici, ingénieur et fondateur de The Shift Project. (site personnel, 2013)

Une transition en double teinte

Une transition énergétique a pour but de tendre vers un modèle pérenne d’approvisionnement en énergie, autant indépendant et décarboné qu’économiquement convenable. En ce sens, l’on ne peut pas dire que l’Allemagne ait réussi sa transition. Néanmoins, ses efforts n’ont pas été vains. En effet, l’Allemagne a appris à manier la technologie du renouvelable, ce qui va inéluctablement aider le reste de l’Europe pour le développement de ces technologies. De plus, les puissances industrielles et les pouvoirs publics se concertent afin de trouver une solution commune. Ainsi, le BDI, la fédération de l’industrie allemande, a jugé possible l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050, à condition d’y mettre le prix : 2 300 milliards d’euros. (Le Monde, 2022)

« Entre 2010 et 2020, nous avons réduit les émissions de 15 millions de tonnes par an en moyenne. D’ici à 2030, nous devons les réduire de plus de 40 millions chaque année. »

Robert Habeck, ministre de l’Économie et du Climat lors de la présentation ambitieuse de son plan climat, le 11/01/2022