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Pourquoi il est nécessaire de diversifier le mix électrique

Dans le grand débat du mix énergétique, on entend souvent la même prérogative : il faudrait diversifier le mix électrique. Cela fait même partie des « deux grands leviers » du gouvernement, avec celui de baisser sa consommation. Mais pourquoi diversifier exactement ? La diversification de nos moyens de production d’énergie n’aide pas en soi à une diminution de nos émissions de gaz à effets de serre. Diversifier pour diversifier, ça ne sert à rien.

Le ministère de la transition écologique explique très simplement l’enjeu : « la diversification du mix électrique est essentielle, car elle vise à rendre le système électrique français plus résilient face à de possibles aléas. » Une explication synthétique et efficace, mais que l’on voit bien trop peu dans le débat public. On préfère fustiger les éoliennes ou crier haro sur l’atome. Pourtant, en diversifiant, on évite tout black-out et on maitrise finalement mieux notre consommation électrique.

Le mix électrique de la France métropolitaine est dominé par le nucléaire. Connaissances des énergies, d’après RTE.

Chaque moyen de production d’énergie a des inconvénients relatifs à une diversité d’aléas. Tout l’enjeu est donc de minimiser voire de supprimer les conséquences de ces aléas. Diversifier le mix électrique est une solution.

Les centrales à gaz, au pétrole et au charbon sont de toute évidence les premiers moyens de production électrique à écarter. Afin de réduire notre vulnérabilité, on pourrait très bien chercher un fournisseur fiable, mais au vu de l’instabilité géopolitique des fournisseurs mondiaux – on l’a très bien vu avec la guerre en Ukraine – et surtout au regard de leur bilan carbone, il n’y a pas de raison de continuer à utiliser ces sources d’électricité. En France, seul 10% de notre production électrique est concernée par ces moyens à haute émission de GES, un chiffre qui stagne tout de même depuis plus de 30 ans et qui ne dit pas grand-chose de notre consommation énergétique.

Concernant les centrales nucléaires à fission, on observe des problèmes – non négligeables mais souvent négligés – résultant d’approvisionnement en uranium (saviez-vous par exemple, que la France importe une grosse partie de son uranium à la Russie ?), mais aussi de fuites et de refroidissement à l’aide de sources d’eau qui tendent à monter en température et à diminuer. Le risque est de paralyser le parc nucléaire avec des maintenances à répétition et donc des pertes d’énergie de plus en plus importantes. Néanmoins, les conséquences sont plutôt bien connues et les solutions aussi, à savoir construire les centrales davantage près de la mer en circuit ouvert ou bien près d’une importante source d’eau et avec des tours aéroréfrigérantes. De plus, il faudra veiller à ce que les centrales ne soient pas installées dans des zones inondables – là aussi, ce n’est pas insolvable.

Energies renouvelables

Du côté des énergies renouvelables, on retrouve les fameux panneaux photovoltaïques ainsi que les éoliennes. Le problème est connu puisqu’il s’agit encore une fois de leur intermittence : quand le vent ne souffle plus et que les nuages couvrent le ciel, la production d’électricité est à son plus bas. Si on se penche sur les barrages hydroélectriques, on aperçoit également que le réchauffement climatique risque de fortement impacter le niveau des bassins en amont qui actionnent les turbines (et irriguent plusieurs champs – le problème n’est ici pas exclusivement électrique). En vérité certaines conséquences sont déjà visibles. Par exemple, au Brésil, plusieurs barrages récents font face à un manque de pluie, ce qui a pour conséquence de baisser considérablement la production électrique.

Diversifier le mix électrique conduit donc à minimiser les risques d’une impossibilité de production : le vent ne tourne pas ? Pas grave, on a du nucléaire (variante allemande : « Pas grave, on a du charbon »). D’un autre côté, un niveau conséquent d’éoliennes terrestres et de panneaux solaire peut laisser le champ libre aux maintenances des sites nucléaires par exemple. L’important est de diversifier intelligemment avec des moyens de production complémentaires tout en ayant en tête que le changement climatique va altérer notre production électrique. Une production qui tend malheureusement à augmenter dans le mix énergétique (voitures électriques, chauffage par pompe à chaleur, etc.) dans une logique d’émancipation vis-à-vis des énergies fossiles polluantes. Mais attention, il n’y a pas de mix magique. Tous les pays ne sont pas capables de se doter en nucléaire ni en barrages hydroélectriques par exemple.

Le nucléaire indispensable ?

Dans sa synthèse des Futurs énergétiques 2050, RTE a imaginé six scénarios de mix électrique, allant du 100% renouvelable au mi-nucléaire mi-renouvelable. Si vous avez bien compris les enjeux, vous devriez vous demander comment un mix sans nucléaire et sans centrale thermique polluante est réaliste. Toujours selon RTE, la solution principale reposerait sur les centrales thermiques utilisant des stocks de gaz décarbonés et sur les stations de transfert d’énergie par pompage (STEP). Ce sont elles qui vont pouvoir sécuriser le système électrique à grande échelle, par exemple dans les cas où le soleil est caché et le vent souffle peu. De manière quotidienne, des batteries seront également mises en place. Les panneaux solaires les rechargeraient la journée, et on dépenserait l’énergie accumulée du soir au matin. Au-delà de ces solutions techniques de back-up et de batterie, RTE prévoit d’accroitre la flexibilité. Il faudra gérer intelligemment notre consommation d’électricité en fonction de la production : recharger sa voiture le jour, chauffer le soir, etc. Enfin, dans les scénarios les plus renouvelables, l’interconnexion (et donc l’interdépendance) entre pays européens sera logiquement accrue afin de palier le mieux possible la demande électrique.

Ce qu’il faut retenir, c’est d’abord qu’il faut bannir tous les discours radicalement pour un seul type d’énergie. Ceux fustigeant les énergies renouvelables tout en prônant le nucléaire, eh bien ceux-là se prennent 7%. Blague à part, c’est une récurrence dans un certain discours énergétique de droite qu’il faudrait abandonner. Aussi, il ne faut pas oublier que le mix électrique n’est que l’arbre qui cache la forêt : c’est notre consommation d’énergie permanente qui doit être questionnée, pas seulement notre consommation électrique.

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